La malédiction de Whitechapel



Résumé : Par une belle journée d'Octobre, Lucinda part à la conquête d'un amoureux et rencontre une légende....

 

Genre :  Mystère, Horreur

 

Rating : T

 

Note : Inspirée par l'histoire de l'éventreur forcément... Par contre la comptine est de moi


La malédiction de Whitechapel

31 Octobre 1899, Londres.

 

 

Lucinda Crackwell ouvrit les yeux, frissonnante dans la froideur matinale alors qu’elle se forçait à sortir de son lit. Ses pieds menus s’enfoncèrent avec délice dans le tapis épais de sa chambre et elle se dirigea vers la porte. Le cœur battant, elle se força à masquer son excitation et affecta un air soumis tandis qu’elle écoutait silencieusement les projets de voyage de ses parents pour la journée.

 

Mary Crackwell se tourna vers sa fille, un peu inquiète à l’idée de la laisser seule, enfin si on oubliait les domestiques, dans la maison déserte

« Es-tu certaine que tu ne préfères pas que nous restions avec toi ma chérie ? »

Lucinda retint un mouvement d’horreur à cette idée et elle se composa une expression soumise

« Voyons Mère, c’est inutile … Après tout je ne suis plus une enfant, j’ai presque vingt ans…

- Et toujours pas mariée. » Grommela son père en agitant son journal.

 

Lucinda croisa le regard de sa mère et cette dernière soupira avant d’adresser un regard agacé à son époux.

« Ça viendra Lucinda… Tenta-t-elle de rassurer sa fille, tout en suivant du regard la bouche trop grande et les boucles brunes et ternes de cette dernière. Ça viendra. » Répéta-t-elle comme pour s’en convaincre elle-même.

Sa fille ne répondit pas, se contentant d’un sourire calme alors qu’elle bouillait intérieurement d’impatience à l’idée du rendez-vous qu’elle s’était donné avec son destin dans quelques heures à peine…

 

Finalement, le moment qu’elle attendait tant arriva et Lucinda regarda d’un œil brillant la calèche de ses parents les emporter vers la vieille tante à la maladie contagieuse dont il n’eut pas été prudent qu’elle s’approche. Lucinda ne perdit pas de temps en vaines pensées vers la vieille femme et se précipita dans sa chambre et choisit la tenue la plus seyante de son armoire. Une robe de soie rouge qu‘elle avait soigneusement dissimulée… Audacieuse, beaucoup trop pour une jeune fille de bonne famille… Elle se l’était procurée chez une couturière des quartiers les plus démunis de la ville à l’occasion de l’une des interminables visites de charité que sa mère l’obligeait à accomplir… Comme si ça pouvait être plaisant de visiter des personnes qui n’étaient même pas capable de se vêtir correctement ! Enfin… Au moins les visites lui avaient permis de dénicher la robe…

 

Chassant les pauvres et leurs vies inintéressantes de son esprit, Lucinda s’empressa de passer la robe rouge. La jeune fille savoura la caresse de la soie sur sa peau et ferma brièvement les yeux comme une enfant avant de les rouvrir face au miroir de sa chambre. Un cri de surprise et de ravissement mêlés lui échappa alors qu’elle se découvrait. La robe mettait en valeur un corps qu’elle savait pourtant ne pas être gracieux, le rouge agressif donnait un éclat nouveau à ses cheveux les faisant presque briller… Pour la première fois de sa vie Lucinda se trouva belle… Elle tourna sur elle-même et sourit… Ainsi elle pourrait séduire un homme … Les jeunes gens qui voyaient à peine Lucinda Crackwell seraient sans nul doute séduits par la créature magnifique qu’elle était devenue… Un sourire confiant aux lèvres, Lucinda s’empara de sa capeline et la referma soigneusement, dissimulant sa tenue aux regards curieux des domestiques.

 

Avec le pas alerte de celle qui ont décidé de prendre leur destin en main, Lucinda descendit rapidement les escaliers

« Je vais chez Marge. Jeta-t-elle au domestique. Mère et Père sont avertis, ils préfèrent que je ne passe pas la journée seule » Mentit elle sans vergogne avant de se précipiter à l’extérieur, indifférente à la réaction du domestique

 

Une fois à l’extérieur, Lucinda inspira profondément l’air frais du matin londonien et se dirigea vers le quartier qu’elle savait être celui des divertissements… Son plan était simple … Elle se posterait dans un établissement à la mode, sa robe rouge reposant gracieusement autour d’elle, et attendrait qu’un des hommes présents s’interroge sur l’identité de la mystérieuse et magnifique jeune femme qui était seule … Lucinda n’avait pas peur d’être reconnue… La plupart des hommes la voyait de toute manière à peine et il était rare qu’ils parviennent à se souvenir de son prénom…. Non ; personne ne reconnaîtrait Lucinda Crackwell dans cette créature somptueuse !

 

Sure de son charme et de bientôt saisir une chance qui s’était trop souvent dérobée devant elle, Lucinda progressa rapidement dans les rues, gardant inutilement les yeux baissés avant de les remonter en constatant avec amertume qu’une fois de plus, personne ne faisait attention à elle.

 

« Dans la brume lugubre…

Les flammes du spectre maudit brillent encore de mille feux …

Prend garde au silence qui précède sa présence...

Prend garde à ne pas être dans les rues lorsqu’il sortira de l’oubli…

Ne sort pas après minuit » Chantonna une petite fille à côté de Lucinda

 

Cette dernière sourit légèrement, amusée par la comptine superstitieuse que fredonnaient les enfants pour se faire peur. Les sourcils froncés, Lucinda tenta brièvement de se rappeler de la suite avant de renoncer… Elle avait mieux à faire !

 

Quelques heures plus tard….

 

Assise au fond d’une salle remplie de monde, Lucinda refoula une vague de désespoir… Une fois de plus, personne ne s’était soucié d’elle…. Réprimant ses larmes et son humiliation, la jeune femme se leva et glissa sa capeline sur ses épaules avant de se jeter dans le froid vif de la fin de l’après-midi. Comment avait-elle pu être aussi stupide ? Comment avait-elle pu croire la vieille femme qui lui avait vendu la robe et qui avait prétendu que cette dernière avait le pouvoir de rendre celle qui la portait irrésistible … C’était stupide… Une de ces superstitions idiotes que les vendeuses rouées instillaient dans les esprits des jeunes filles crédules…

 

Lucinda reniflait sans distinction lorsqu’une main gantée se posa sur son épaule. Surprise, elle se retourna et rencontra le regard attentif d’un homme d’une quarantaine d’années au visage énergique et non dénué de charme

« Pardonnez mon audace… Mais je ne pouvais vous laisser partir sans vous avoir parlé… »Annonça l’homme en soulevant son chapeau avec politesse

La jeune femme rosit de plaisir tandis que l’homme glissait un bras autour de sa taille.

« M’autoriseriez-vous à faire quelques pas en votre compagnie Miss … ?

- Lucinda. Répondit cette dernière en rougissant de plus belle. Et ce sera avec plaisir Monsieur ? »

L’homme sourit et s’inclina

« Je me présente Jack Rip… Pour vous servir… »

 

Lucinda prit son bras et se laissa entraîner par son prétendant. Elle avait l’impression de flotter tant elle était heureuse d’avoir enfin attiré un regard masculin… Bien sûr Jack n’était pas un jeune homme fringuant comme ceux sur lesquels elle avait longuement fantasmé mais elle trouvait déjà beaucoup de charme à ses rides ... Et puis quelle victoire, quelle gloire de réussir à mettre la main sur un homme mur qui avait l’expérience des femmes !

« Votre robe est somptueuse... Elle vous va à ravir… »Murmura l’homme en la guidant à l’intérieur d’une maison

Lucinda se laissa faire sans protester, le cœur battant à l’idée de peut-être bientôt recevoir son premier baiser…

« Du vin ? » Proposa l’homme en servant un plein verre d’un liquide aussi rouge que la robe de Lucinda.

 

Cette dernière accepta le verre avec reconnaissance et but goulûment. Le regard de l’homme constamment posé sur elle la rendait un peu nerveuse. Agréablement nerveuse…

« Approche. » Lui demanda brusquement l’homme en glissant sa main sur sa peau

Lucinda approcha lentement, soudainement effrayée… Elle était seule avec un homme inconnu… Un homme qui glissait à présent sa main le long de sa robe et se penchait sur elle, la dominant de toute sa taille.

« Allonge-toi… »Ordonna-t-il en la poussant vers le canapé

Lucinda ouvrit la bouche pour protester, pour expliquer que la robe était une sorte de déguisement, qu’elle n’était pas une fille facile mais les lèvres de Jack se posèrent sur les siennes. Avec un soupir la jeune femme savoura son premier baiser, à peine consciente des mains fortes de son partenaire qui remontaient sa robe. Elle ne réagit pas plus lorsque des liens se refermèrent sur ses poignets, l’emprisonnant…

 

L’homme finit par se reculer et Lucinda s’aperçut alors des liens qui l’entravaient… Elle croisa le regard brûlant de son partenaire et tira sur ses liens, affolée… Alors qu’elle ouvrait la bouche pour lui demander de la libérer Lucinda nota enfin le scalpel qui brillait dans sa main.

« Je dois purifier Londres de la malédiction qui la ronge » Annonça Jack.

 

Terrifiée, Lucinda sentit la lame affûtée entailler la soie de sa robe puis sa peau, laissant un rigole rouge sur son passage. Une peur insondable dans le regard, Lucinda comprit que la robe ne lui avait pas porté chance… Alors que Jack l’éventrait lentement, prélevant ses organes comme il l‘avait fait avec chacune des catins qu‘il avait tué, les paroles de la comptine lui revinrent brutalement :

 

« Dans la brume lugubre…

Les flammes du spectre maudit brillent encore de mille feux …

Prend garde au silence qui précède sa présence..

Prend garde à ne pas être dans les rues lorsqu’il sortira de l’oubli…

Ne sort pas après minuit…

Jamais ne marchande tes faveurs

Ou Jack l’éventreur 

Reviendra pour toi …

Et te punira.

C‘est la Malédiction des belles de Whitechapel »

 

Alors que la jeune femme s’éteignait, un voile aussi rouge que sa robe se déposant sur ses yeux ; Jack s’écarta d’elle, un sourire féroce aux lèvres. Il saisit la robe rouge de ses doigts gantés et la contempla longuement avant de la porter à ses narines pour mieux en humer le parfum. La robe de Mary Kelly … Il l’avait reconnue au premier coup d’œil… Les narines frémissantes, Jack replia soigneusement la robe et se tourna ensuite vers Lucinda pour dépecer soigneusement son corps. Une fois satisfait de son œuvre, l’assassin sortit tranquillement et se glissa dans les rues de Londres, la brume l’entourant peu à peu.

 

Dans la pièce maintenant souillée du sang de Lucinda, la robe rouge que la jeune fille avait achetée dans l’espoir d’attirer un regard masculin attendait patiemment qu’une nouvelle femme la revête. Finalement la vendeuse avait dit vrai…la robe avait réellement le pouvoir de rendre celle qui la portait irrésistible…

 

Aux yeux de Jack l’Éventreur.


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Commentaires: 4
  • #1

    Wizzette (lundi, 31 octobre 2011 22:29)

    C'est sur qu'elle a attiré le regard d'un homme, mais ça aurait mieux fait d'être celui de quelqu'un d'autre que Jack.
    C'est bien écrit, avec un peu de suspens.

  • #2

    JessSwann (mardi, 06 décembre 2011 22:37)

    Lol merci bien, je me rappelle que c'était pour un concours Halloween avec des mots imposés et tout ( d'où la comptine hem)

  • #3

    Anna (dimanche, 20 octobre 2013 11:20)

    Pauvre Lucinda ! Quelle morale dans cette nouvelle ;) J'aime bien.

  • #4

    JessSwann (dimanche, 20 octobre 2013 12:35)

    Merci Miss, elle est super vieille celle-ci et super courte aussi :(