Chapitre 25 : Malentendus et départ


Jack était seul dans sa cabine. En effet depuis la venue de Jones sur le Pearl, ni Anamaria, ni Elizabeth ne lui adressaient la parole et sa joue portait encore la marque brûlante des doigts de la fille du Gouverneur.

« Et maintenant Jack ? Que comptes-tu faire … Ou plutôt quand comptes-tu tout lui dire ? » Le tança un de ses avatars.

Jack soupira bruyamment et songea qu'il aimerait que ces voix le laissent enfin tranquille, mais malgré tout il répondit à voix haute.

« Je ne sais pas, pas du tout. » Murmura-t-il tandis que ses doigts caressaient machinalement la clé ouvragée qui se trouvait au fond de sa poche.

 

La clé du coffre de Davy Jones. Il l'avait subtilisée au poulpe lorsqu'il avait négocié sa liberté et celle d'Elizabeth contre la vie de Will Turner, entre autres choses. A présent que le gamin lui avait ramené son précieux compas, il ne lui restait plus qu'à localiser le coffre et il se trouverait en mesure d'entrer en possession du cœur de Jones et donc d'exiger ce qu'il voudrait de ce dernier. Y compris de rendre la liberté à William Turner et à son père. Bref un plan parfait qui se déroulait exactement comme prévu.

« Vraiment ? Alors dans ce cas pourquoi tu sens tu aussi mal ? »

 

Jack dédaigna de répondre à cela. Ce n'était pas la peine de dire à voix haute ce qui le gênait, le poids qui pesait sur son cœur lui en apprenait suffisamment sur ce qui le tourmentait. Il avait toujours été dans ses projets de trouver le moyen de libérer le jeune forgeron, seulement à présent il n'en avait plus envie. Il n'arrivait pas à oublier la vision de Will en train d'embrasser sa Lizzie et l'idée qu'il puisse un jour réclamer plus de la jeune femme lui donnait envie de vomir. Une fois que Will serait libre, il reviendrait et alors Lizzie serait à lui et rien que cette idée le rendait fou. Un moment Jack imagina la bouche de Will sur le corps dont il avait goûté les charmes en premier, les mains rudes et inexpérimentées caressant la poitrine d'albâtre, avant de … La main du pirate se resserra sur la bouteille qu'il tenait sans même qu'il s'en rende compte, le regard perdu tandis qu'il se torturait en imaginant la jeune femme dans d'autres bras.

« NON ! » Dit-il à haute voix tandis que la bouteille se brisait sous la force de son étreinte.

 

Pendant quelques secondes, Jack regarda stupidement sa main et le sang qui s'en écoulait puis vint la douleur. Jack grimaça et prit un morceau de tissu pour bander sa main. Alors qu'il se soignait maladroitement, sa pensée dériva à nouveau et revint sur l'île de Molokai. Jack se surprit à penser qu'il regrettait la venue de Will, surtout de Will, et d'Anamaria sur cette île.

 

« Allons Jacky c'est-ce que tu avais prévu non ? Le gamin vient, te rend le compas, et tu donnes le forgeron à Jones le temps de trouver le coffre. Rapide, simple. Tout ce que tu aimes, surtout qu'en prime tu as récupéré le Pearl ! »

 

Jack soupira. Non ça n'allait pas. Il aurait préféré que son plan échoue, il aurait pu passer sa vie entière sur Molokai. Avec elle.

« Tu es pitoyable Jack… C'est-ce genre de raisonnement qui nous conduira à notre perte. Réfléchis imbécile ! Peut-être que tu accordes de l'importance à cette gamine mais tu n'en as aucun pour elle. Elle préfère Turner.

- La ferme. » Répondit Jack en se dirigeant lourdement vers la porte de sa cabine. Il avait besoin de rhum, un besoin pressant.

 

Une fois sur le pont il repéra tout de suite les deux femmes. Silencieuses, elles se tenaient l'une près de l'autre sans pour autant se parler et même à cette distance leur antagonisme était perceptible. Le regard de Jack s'arrêta brièvement sur Anamaria, il la connaissait parfaitement du moins le croyait il et décela dans la crispation de sa mâchoire une colère sourde. Il remonta vers ses yeux sombres et fut surpris de la peine qu'il y lut. Anamaria, habituellement si froide, paraissait sous le coup d'une peine immense et semblait totalement ailleurs. Jack se demanda un instant les raisons d'une telle affliction. Jusqu'à ce que ses yeux se posent d'eux même sur Elizabeth. Alors il oublia tout, le rhum qu'il avait envie de boire, l'inexplicable peine d'Anamaria, le sang qui continuait à teinter de rouge le mouchoir qu'il avait noué autour de sa main blessée… Son regard se posa sur le visage qui hantait ses nuits depuis leur première rencontre et son cœur se serra à la vue des larmes difficilement contenues qui rendaient ses yeux plus brillants encore.

 

Jack s'approcha d 'Elizabeth. Il voulait lui dire, lui expliquer son plan, le coffre, Jones, elle. Tout. Il désirait plus que tout voir disparaître le mépris du regard qu'elle posait sur lui. Il fixa un instant ses lèvres charnues, pris d'un violent désir de les goûter à nouveau avant de se décider à affronter son regard. Il se racla la gorge et commença :

« Elizabeth, je…

- C'est Miss Swann, Capitaine Sparrow. Je ne veux pas entretenir de familiarités avec un lâche et un menteur. Tous vos actes sont méprisables tout comme votre personne. Vous me dégoûtez. Quand je pense que vous avez échangé la vie de Will contre la vôtre ça me donne envie de vomir. Je regrette d'avoir pu entretenir la moindre relation avec vous ! Jamais je ne me pardonnerais une telle erreur. »

 

Jack accusa le coup en silence et sentit son cœur se serrer un peu plus à chaque mot prononcé. Puis il se décida finalement. S'il voulait un jour avoir une chance qu'elle lui pardonne il devait lui dire la vérité et donc lui rendre son cher Will même si en faisant ça il la perdait, au moins pourrait-il la voir de temps à autres. Il sortit lentement la clef ouvragée de sa poche.

« Elizabeth. Commença-t-il d'un ton calme en la fixant dans les yeux, cherchant celle qu'il avait connue sur Molokai. Je n'ai jamais eu l'intention d'abandonner l'inestimable Monsieur Turner aux tentacules de Jones. Sa réclusion sur le Hollandais Volant n'est que temporaire et lui permettra de rencontrer son père ce qui était je vous le rappelle son vœu.

- Vous essayez de me faire croire que vous lui avez rendu service ? » Demanda Elizabeth un rien acide.

Jack ne tint pas compte de l'interruption et continua d'une voix basse.

« Cette clef permet d'ouvrir le coffre contenant le cœur de Jones. Une fois que nous l'aurons localisé nous serons en mesure de négocier la libération de Will et de son père.

- Oh … »

Jack sourit en voyant la réaction d'Elizabeth mais son triomphe fut de courte durée.

 

L'air méprisant, elle avança vers lui et plongea à son tour son regard dans le sien.

« Et vous pensez que je vais vous croire ? Dans ce cas puisque vous aviez la clef pourquoi ne pas avoir cherché le coffre dès notre délivrance de Mokolai.

- Molokai. Murmura Jack sous le choc, le cœur brisé par le fait qu'elle se soit sentie prisonnière de cette île où il avait vécu les plus beaux moments de sa vie.

- Au lieu d'agir avec honneur et de sauver Will vous avez préféré vous vautrer dans un lit avec cette femme ! » Cria-t-elle en désignant Anamaria.

Le pirate recula prudemment devant ce débordement de rage et leva une main impuissante, cherchant les mots pour lui expliquer que le fait de l'imaginer dans les bras de Will lui était si insupportable qu'il avait tenté de la blesser comme elle l'avait fait.

 

«  Vas y rend toi encore plus ridicule…Explique lui que si tu as couché avec Anamaria c'est parce que tu voulais te prouver qu'elle ne comptait pas pour toi, comme tu ne comptes pas pour elle. Explique ça devant tes hommes. »

 

Devant son silence qu'elle interpréta comme un aveu et une preuve supplémentaire de sa lâcheté, Elizabeth conclut.

«  J'ai cru à votre sincérité Jack et vous m'avez menti et utilisée. Jamais je ne vous pardonnerai. Pas après ce que vous m'avez volé. Mes rêves, mes illusions et plus grave encore mon cœur que vous avez brisé. Quand à Will je suppose que par le nous le délivrerons vous parlez de cette femme et vous. Pour ma part est-ce vraiment nécessaire de vous rappeler que je compte bien rentrer chez moi et être ainsi débarrassée de votre présence ! Sur ce je vous laisse avec Anamaria puisque vous l'appréciez tant ! » Finit elle avant de s'éloigner à grands pas vers les quartiers qu'il lui avait assignés pour qu'il ne voit pas les larmes brûlantes qui inondaient ses joues.

Jack, pâle sous son hâle la regarda s'éloigner sans essayer de la retenir. La jeune femme avait été claire, elle ne voulait pas de lui. Maintenant plus que jamais. Il l'avait perdue.

« Mais l'as-tu jamais eue ? »

Avant qu'il ait le temps de s'appesantir sur ce sujet Anamaria s'approcha de lui et darda ses prunelles sombres dans les siennes.

« Tu as intérêt à tenir ta promesse Jack. Sinon je te jure que je te le ferais regretter. »

 

Sans attendre de réponse, la jeune femme s'en alla, laissant Jack plus seul que jamais.

Il ne parvenait pas à réfléchir raisonnablement pour la première fois de sa vie. Jack sortit son compas et observa l'aiguille qui tournait sans parvenir à se fixer plus de trois secondes sur un point. Chaque fois qu'il tentait de se persuader qu'il désirait plus que tout au monde libérer Will et ainsi mériter la confiance d'Elizabeth l'image des deux jeunes gens enlacés s'imposait à lui, faisant osciller le compas et se serrer son cœur. Jack finit par refermer ce dernier avec un air de dégoût. C'était inutile de s'entêter, il n'y parviendrait pas, il n'arriverait pas à se convaincre qu'il accepterait de voir Will Turner poser à nouveau les mains sur sa Lizzie. Mais s'il ne trouvait pas un moyen de délivrer le jeune forgeron au plus vite, il perdrait à tout jamais la confiance d'Elizabeth et le peu d'estime qu'elle avait pu lui porter. Il soupira lourdement et se dirigea finalement vers les cales du navire, il avait besoin de rhum et le plus tôt serait le mieux. Sans regarder personne Jack prit sa bouteille et remonta s'enfermer dans sa cabine. Avec un geste las il commença à se saouler, espérant ainsi oublier la saveur douce-amère que lui avait laissée l'île de Molokai.

 

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Jack était complètement saoul lorsqu'ils arrivèrent à Tortuga et ne se donna pas la peine de sortir de sa cabine, laissant à Gibbs le soin de s'occuper des réserves. Il n'avait pas la moindre envie d'aller arpenter les rues de Tortuga et d'être sollicité par les catins qui peuplaient la ville. Pas cette fois. Pas après elle. Jack regrettait même son étreinte avec Anamaria, plaisir fugace dans lequel il avait cru pouvoir noyer le désir qui couvait dans ses reins depuis la première fois. Un sourire douloureux monta à ses lèvres, lui qui avait toujours su se tenir à distance des femmes les plus désireuses de l'enchaîner, une seule fois avait suffi pour que cette fille de gouverneur le rende fou de désir. Depuis qu'il était enfermé dans sa cabine Jack n'avait pas cessé de penser à Elizabeth et sa tristesse ne cessait d'augmenter à chaque fois qu'il constatait avec dépit que son compas ne parvenait toujours pas à se fixer. Mais pourquoi je ne peux plus penser qu'à elle ? Songea-t-il brièvement avant de sombrer dans un sommeil d'ivrogne.

 

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Pendant que Jack tentait sans succès de l'oublier en tâtant de la bouteille, Elizabeth Swann remâchait les derniers événements dans sa cabine. Elle n'en voulait plus réellement à Jack pour ce qu'il avait fait à Will. Malgré ce qu'elle lui avait dit, elle savait qu'il n'aurait pas envoyé le jeune forgeron sur le navire de Jones s'il avait pu faire autrement. Jack était quelqu'un de bien.

 

Ah oui c'est pour cela qu'il a couché avec cette Anamaria ? Il a menti du début jusqu'à la fin. Toutes ces conversations que nous avons eues, toutes ces histoires et pourtant aucune n'était vraie.

 

Un instant distraite de ses sombres pensées par les cris qui résonnaient dehors, Elizabeth jeta un œil à travers la vitre sale de sa fenêtre. Tortuga. Ils étaient à Tortuga et en s'en apercevant elle resserra la couverture dont elle s'était enveloppée autour d’elle. Elle ne descendrait pas du navire, elle n'aurait pas la force d'affronter le spectacle de Jack se pavanant avec les catins qui peuplaient l'île. Elle l'avait déjà vu avec Anamaria et une seule fois avait suffi pour qu'elle comprenne qu'elle ne supporterait pas de voir Jack au bras d'une autre. Avec un soupir elle posa son front brûlant d'une fièvre qu'elle ne parvenait plus à éteindre sur la vitre froide. Mais pourquoi je ne peux plus penser qu'à lui ? Songea-t-elle alors que des larmes amères commençaient à rouler sur ses joues.

 

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Anamaria mit pied à terre avec soulagement, la jeune métisse avait besoin de s'éloigner du Black Pearl, de Jack Sparrow et de cette garce d'Elizabeth Swann. Sans but précis elle marchait dans les rues de Tortuga et se remémorait avec amertume sa dernière visite dans ce lieu. La dernière fois elle était seule capitaine du Black Pearl et elle n'avait nulle autre ambition que celle de piller, voler et ravager les mers. Et puis il était arrivé. Avec son sourire charmant et la possibilité pour elle d'appartenir enfin à l'élite des pirates. Devenir un Seigneur, c'était son rêve depuis son entrée dans la piraterie mais sans Will à ses côtés sa réalisation perdait soudain de son éclat. Pendant toutes ces semaines de voyage aux côtés du jeune forgeron elle s'était attachée à lui, beaucoup trop. Elle fuyait le Black Pearl parce qu'elle le voyait derrière chaque cordage, chaque porte. Lui et sa calme détermination, lui et son abnégation qu'il vouait à une autre qui ne le méritait nullement. Et maintenant à cause de cette Elizabeth Swann, Will était pris au piège des tentacules de Jones sans qu'elle n'ait rien pu faire pour sauver celui qui n'avait pas hésité à risquer sa vie pour sauver la sienne. Et ce sale rat de Sparrow avait échangé la vie de Will contre sa libération et celle de la fille du gouverneur. Anamaria avait bien prêté attention aux mots de Jones et elle avait compris que si Jack avait agi de la sorte c'était surtout pour la sauver elle. Mais maintenant elle aussi avait un moyen de pression sur Jack. Elle avait bien vu le regard affamé qu'il posait sur Elizabeth Swann, un regard qu'elle ne lui avait jamais vu adresser à aucune femme. Jack lui avait pris Will et fait souffrir au-delà de tout le jeune homme. Anamaria ne savait pas encore comment mais elle lui ferait payer ça au centuple. Quand à cette maudite Elizabeth Swann qui ne savait pas différencier un trésor d'un cancrelat elle aussi recevrait ce qu'elle méritait !

 

Anamaria fut brutalement sortie de ses rêves de vengeance cruelle par la sensation désagréable d'être observée. Regardant autour d'elle, elle aperçut un homme au visage rudement marqué qui se tenait à l'écart, adossé contre un mur. Lorsque leurs regards se croisèrent, Anamaria eut l'impression qu'une main glacée venait de se poser sur sa nuque. L'homme s'approcha d'elle d'un pas délié avant de s'immobiliser à quelques centimètres de son visage. Les sens en éveil, Anamaria se força à ne pas bouger et imposa le silence à la voix intérieure qui lui hurlait que cet homme était un assassin. Finalement il prit la parole d'une voix basse et ironique dont le ton dénotait son habitude du commandement.

« Anamaria Mérida. Vous ressemblez en tout point à la description qu'ont faite de vous les gardes de la prison de Port Royal avant de mourir. »

 

La jeune femme accusa le coup … ainsi cet homme savait précisément qui elle était. Et ce qu'elle avait fait. Avant qu'elle ait eu le temps de reprendre la conversation en main, l'homme reprenait sur le même ton tout en la forçant imperceptiblement à reculer.

« Ce que nous ne comprenons pas c'est pourquoi le jeune Turner et vous vous êtes donnés tant de mal pour faire échapper ces deux guignols que Norrington avait arrêtés sur la Muerta. »

Anamaria tenta de sourire bravement, intérieurement paniquée à l'idée qu'il puisse connaître l'existence de la confrérie et sa nouvelle place au sein de cette dernière.

« Il y a donc des choses que vous ignorez. Moi qui pensais que vous saviez tout. »

L'homme négligea de répondre à sa provocation et lui agrippa le poignet avant de le commencer à le tordre lentement, arrachant un cri de douleur à la jeune femme.

« Où est Monsieur Turner ? Il est en possession d'un objet que je désire ardemment. »

Les dents serrées sous la douleur, se sentant si seule à pourtant quelques pas de la population grouillante de l'île, Anamaria répondit d'une voix qui tremblait un peu.

«  Il n'est plus avec moi. Il a été fait prisonnier par Davy Jones. »

La poigne de l'homme se durcit encore que son poignet tandis qu'il la poussait plus loin dans la ruelle sombre, son corps à présent plus proche du sien.

« Et le compas qu'il avait avec lui ? Où est-il ? » Demanda-t-il d'une voix toujours plus basse à la douceur factice en la repoussant contre le mur d'une misérable masure.

 

Malgré sa terreur Anamaria réfléchit rapidement, le compas de Jack Sparrow était le seul moyen pour elle de trouver ce qui lui permettrait de délivrer Will. Elle ne pouvait pas se permettre de le perdre, pas plus qu'elle ne pouvait lui donner Jack malgré l'envie qu'elle en avait. Le pirate était beaucoup mieux renseigné qu'elle sur Jones et elle ne pouvait raisonnablement pas livrer un autre Seigneur de la piraterie c'était contraire au Code de Morgan et Bartholomew. Aussi, malgré sa peur, elle répondit simplement :

« Pas en ma possession.

- Dans ce cas vous n'êtes d'aucune utilité pour Lord Beckett. » Murmura l'homme en collant franchement son corps contre le sien tandis qu'un éclat métallique s'allumait dans sa main.

 

Anamaria luttait contre la panique qui faisait flageoler ses genoux, du fond de sa terreur, elle reconnut un nom. Beckett. Le fiancé de la garce.

« Et si je vous permettais de retrouver Elizabeth Swann ? »

La lame se figea dans l'air avant de s'éloigner lentement de sa gorge.

« Peut être que votre vie vaudrait quelque chose. Ramenez-moi Elizabeth Swann et vous et votre navire pourrez quitter Tortuga sans crainte des canons de la Compagnie. Mais si vous échouez… Susurra-t-il en caressant brièvement sa joue avant de descendre jusqu'à son cou autour duquel il referma sa main. Je vous briserais la nuque moi-même, mais pas tout de suite. » Murmura-t-il en effleurant sa joue de sa la lame, l'entaillant légèrement.

Anamaria déglutit. Elle savait que cet homme mettrait sa menace à exécution et qu'il la retrouverait où qu'elle aille. Il entortilla une mèche de ses cheveux sombres autour de son doigt et la contempla d'un air rêveur avant de la relâcher presque à contre cœur.

« Vous avez une heure pour me la ramener. »

 

Le souffle court, Anamaria happa l'air dont il l'avait privée avant de partir vers le Black Pearl sans demander son reste. A mesure qu'elle s'éloignait de cet homme, le sourire revint sur ses lèvres. Finalement cette rencontre n'était pas si mauvaise. Ce marché avec l'homme de main de Beckett allait lui permettre de se débarrasser définitivement de l'intrigante et de rendre la monnaie de sa pièce à Jack. Elle remonta sur le Black Pearl rapidement, la crainte que l'homme mette ses menaces à exécution ne la lâchant pas. Elle évita habilement Gibbs et se dirigea vers la cabine d'Elizabeth, espérant de tout cœur la trouver là.

 

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Elizabeth ne se retourna pas à son entrée, fixant un point indéterminé à travers la fenêtre. Anamaria reprit son souffle et ne prit pas la peine d'enrober son discours de précautions oratoires.

«  Vous allez rentrer à Port Royal. »

Elizabeth fit l'effort de se retourner, la mâchoire crispée elle songea à quel point elle haïssait cette femme. Anamaria, décidée à conserver l'avantage, reprit.

« Un homme est ici, envoyé par votre fiancé. Celui que vous aviez tellement hâte de retrouver. Ne put-elle s'empêcher de dire d'un ton moqueur, cherchant à noyer la crainte que l'homme lui inspirait

- Mais et Will ? Je ne peux pas le laisser et repartir comme ça alors qu'il a risqué sa vie pour moi ! »Commença Elizabeth.

 

Sale petite garce ne fait pas semblant de te soucier de Will ! Pensa Anamaria. Mais c'est toutefois d'un ton qui se voulait compréhensif qu'elle reprit :

« Allons Elizabeth nous savons l'une et l'autre que ce n'est pas le sort de Will qui vous retient ici. »

Elizabeth rougit fortement, encore plus humiliée, en comprenant qu'Anamaria savait.

« Vous n'êtes qu'une enfant qui s'est faite prendre aux beaux discours de Sparrow. Lui dit Annmaria d'un ton moqueur. Une fille de Gouverneur, la fille de l'homme qui l'a condamné à être pendu. Faut-il être stupide ! Vous n'avez rien à faire ici Elizabeth Swann, rentrez donc chez vous auprès de votre fiancé, de votre père et de tous les serviteurs qui ne demandent que ça. »

Elizabeth sentit les larmes monter à nouveau à ses yeux, des larmes de rage cette fois.

« Pourquoi me haïssez-vous à ce point ? A cause de Jack ? »

Anamaria la dévisagea froidement.

«  Non ça n'a rien à voir avec Jack Sparrow. J'ai appris il y a bien longtemps que cet homme n'aimait personne, il en est incapable. Il se contente de jouer avec les êtres et de tirer profit de la situation ou de gamines de votre genre. Allez venez je vous ramène à la sécurité de votre foyer. »

Elizabeth ne bougea pas.

« Vous ne m'avez pas répondu, pourquoi me détestez-vous ? »

Anamaria la regarda avec haine.

« Parce qu'à cause de vous Will Turner est sur le Hollandais Volant. Parce qu'il a voulu sauver une gamine capricieuse et idiote après avoir vu que le père de cette dernière avait le cœur brisé par sa disparition. Et parce je n'aime pas qu'une petite lady gâtée joue les pirates. Est-ce que cela vous convient Miss Swann ? »

Elizabeth accusa le coup… son père. Elle devait le revoir… il devait être si inquiet !

 

Anamaria déchiffra les émotions qui se succédaient sur son visage.

« Allons Elizabeth, rentrez chez vous maintenant, mariez-vous avec ce fiancé qui remue ciel et terre pour vous retrouver et oubliez Jack Sparrow comme il vous a déjà oubliée. Quand à William je crois que vous lui avez déjà fait assez de mal comme ça. J'irais avec Jack le sortir de là mais nous n'avons pas besoin de vous. Retrouvez votre place dans les salons de la haute société Miss Swann et les bras de votre père. »

Elizabeth rendit les armes. Anamaria avait raison, elle n'avait plus rien à faire ici. Jack s'était assez moqué d'elle et finalement cette femme qui était son ennemie lui offrait une occasion de se retirer en conservant des miettes de dignité.

« Si vous me détestez tant pourquoi m’aidez-vous ? »

Anamaria choisit de répondre la vérité pour une fois.

« Parce que cet homme a dit que si je ne vous ramenais pas il coulerait le Black Pearl et dans ce cas Will n'aurait plus personne pour le sortir des tentacules de Jones. Je ne le fais pas pour vous mais pour lui.

- Vous l'aimez ?? Mais dans ce cas pourquoi avez-vous avec Jack ? » Demanda Elizabeth d'une petite voix qui ne parvenait pas totalement à dissimuler la haine qu'elle ressentait pour l'autre femme.

 

Anamaria serra les dents et s'offrit un dernier coup bas, elle sourit mielleusement à celle qu'elle détestait plus que n'importe qui.

« Il est difficile de dire non à Jack. Il sait si bien faire croire qu'il vous désire, que vous êtes la seule pour lui. »

Elizabeth baissa les yeux, le cœur serré et avança sans mot dire, suivant Anamaria dans le dédale des rues de Tortuga.

 

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Les deux femmes parvinrent bientôt à l'endroit où attendait l'émissaire de Beckett. Ce dernier eut un sourire froid en les voyant apparaître côte à côte et se tourna vers Elizabeth pour apprécier d'un regard rapide l'indécence du vêtement qui la couvrait à peine. Décidément il serait intéressant de voir avec quelle facilité cette jeune fille se laisserait pervertir. Calmant l'excitation qui le gagnait à cette idée il s'inclina devant elle.

« Miss Swann. Ce sera un grand soulagement pour Lord Beckett et votre père de vous retrouver intacte et en bonne santé. »

Elizabeth rougit légèrement à la mention du mot « intacte » et inclina la tête vers lui.

« Monsieur Mercer ! Comment va Père ? Et Cutler ? Se força-t-elle à demander, chassant l'impression de trahison qu'elle ressentait vis-à-vis de Jack

- Vous les verrez bientôt. » Murmura Mercer en l'entraînant.

Il regrettait de ne pouvoir s'occuper de la jeune métisse qui l'avait accompagnée. Il aurait aimé voir comment elle supportait la douleur mais après tout un morceau de meilleur choix l'attendait… Songea-t-il en regardant Elizabeth monter à bord du navire qu'il s'était procuré.

 

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Une heure plus tard, le « Fringant » quittait le port de Tortuga, avec à son bord, Mercer satisfait d’avoir rempli sa mission et une jeune fille dont le cœur saignait mais résolue à oublier celui qui l'avait tant fait souffrir.

 

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Pendant ce temps, à bord du Black Pearl, Jack Sparrow dormait d'un sommeil d’ivrogne, un sourire heureux sur le visage tandis qu'il rêvait d'une jeune fille aux cheveux d'or.


Chapitre 24                                                                                                    Chapitre 26


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