Chapitre 50 : Kylo Ren


Mortis,

Bastion de la Lumière,

 

 

« Attends ! »

Le cri de Rey me cueille au moment où je franchis le seuil du monolithe et je me retourne, surpris. 

Il n’y a plus rien derrière moi, hormis un mur d’une blancheur éclatante dont la matière semble aussi dure que la roche de Jalindi. Où est Rey ? Pourquoi ne m’a-t-elle pas suivi ? Je tente de la joindre grâce à notre connexion mais le vide me répond. 

« Bienvenue dans la Maison de la Lumière, cœur pur. »

Une femme à la beauté éthérée me fait face. Ses yeux immenses sont d’un bleu surnaturel et je cherche mon sabre avant de me reprendre. Pas d’actes impulsifs. Avant toute chose, je dois prendre la mesure de la situation.

« Où est Rey ? »

Elle ne répond pas et j’en déduis qu’elle ne compte pas le faire.

« Où suis-je ? 

— Quelle question ! Dans le Bastion du Côté Lumineux ! Je te souhaite un bon voyage dans la Force, cœur pur. »

Cœur pur ? Elle a pris quoi comme épices au juste ? Elle disparait avant que j’ai eu le temps de l’interroger sur l’artéfact et un long corridor blanc se dévoile devant moi. Je resserre ma main sur la poignée de mon sabre et je m’avance. Tout est tellement calme, paisible… Trop paisible et trop vide. Je cherche du regard quelque chose qui puisse ressembler à un artéfact (même si je n’ai pas la moindre idée de ce que cela peut être) et je m’avance lentement. Hors de question que j’échoue par précipitation. Plus je progresse, plus je sens la Force autour de moi. Elle m’entoure, elle m’enserre, me caresse, comme les bras d’une femme, comme les mains de Rey. 

 

« Tu lui ressembles vraiment, jeune Ben. »

Je me raidis et la main qui tient le manche de mon sabre se resserre sur ce dernier. 

« Tout comme Anakin, tu es fougueux et tu ne réfléchis pas beaucoup, malheureusement pour toi. »

Un vieil homme barbu me fait face. J’ai l’impression de le connaitre, mais c’est impossible.

« Nous avons un prénom en commun. Ta mère disait que, pour elle, il signifiait l’espoir. »

Obi-Wan Kenobi, dit Ben… Celui en l’hommage duquel Leia m’a prénommé. Evidemment, il était illusoire d’imaginer que je réussirai à traverser la maison des Jedis sans en croiser un seul. Enfin, ça aurait pu être pire.

« On ne m’appelle plus ainsi désormais…Que me voulez-vous ? Pourquoi êtes-vous ici ? »

Ben Kenobi secoue la tête l’air navré.

« Ce n’est pas la question que tu dois te poser, jeune Ben. La vraie question est celle-ci : que fais-tu, toi, ici ?

— A présent, mon nom est Kylo et si je suis ici, c’est pour trouver l’artéfact Jedi. »

Je me mords la langue, pourquoi est-ce que j’ai dit ça ? Quelle importance qu’il me prenne pour Ben tant qu’il me donne l’artéfact.

Ben Kenobi m’adresse un sourire moqueur.

« Ben ou Kylo, ne crois pas que je ne sache pas qui tu es devenu, ni ce que tu as fait. Nul ne l’ignore entre ces murs. 

— Dans ce cas, vous êtes conscient qu’il est dans votre intérêt de me remettre ce que je suis venu chercher.

— Impatient… Mon jeune padawan l’était aussi. Et beaucoup d’autres choses encore… »

Le visage de l’ancien maître de Vador est empreint de nostalgie et je me souviens de ce que mon ancêtre m’a révélé à son sujet. A une époque, il considérait Obi-Wan comme son seul ami. Peut-être serait-il prêt à m’aider ?

« Je suis ici pour terminer l’œuvre de Vad… d’Anakin. »

A ma grande surprise, Obi Wan éclate de rire. Je ne m’attendais pas à une telle réaction et je me fais violence pour ne pas tirer mon sabre.

« Tu n’as pas la moindre idée de ce que tu essaies de déclencher. Tu es comme Anakin, tu fonces sans réfléchir aux conséquences. Tout cela à cause d’une fille. »

J’ouvre la bouche pour répliquer mais il ne m’en laisse pas l’occasion.

« Je sais ce que tu vas dire… Que ta résolution n’a rien à voir avec la jeune Palpatine et que tu as toujours voulu changer les choses. Et, d’une certaine manière, c’est vrai. Mais, admets que tu serais sans doute moins pressé de t’emparer des artéfacts si la jeune Rey n’était pas menacée par Sidious. Par conséquent, tu te précipites sans réfléchir vers le danger à cause d’une fille, tout comme Anakin l’a fait en son temps.

— Rey n’est pas une fille comme les autres. Et Padmé ne l’était certainement pas non plus. 

—Tu t’égares, tout comme mon padawan avant toi. Tu oublies nos préceptes : Il n’y a pas d’émotions, il y a la paix. Il n’y a pas de passion, il y a la sérénité. 

— Ce ne sont pas mes préceptes, ce sont les vôtres.

— Non, c’est toi qui te trompes, ces règles sont en toi. Seulement, ce que tu ressens pour Rey t’empêche de réfléchir avec ta tête, je le crains.

— Rey n’a rien à voir avec mes choix. Vous le savez, je les ai faits bien avant de la connaitre. Je suis là pour poursuivre l’œuvre de mon grand-père. C’est l’objectif de mon existence entière. »

Obi Wan me fixe.

« Tu es loyal aussi… »

Loyal ? C’est amusant, ce n’est pas le premier mot qui me viendrait à l’esprit si je devais me décrire.

« Loyal envers ceux qui comptent pour toi. Malheureusement, j’ai bien peur que tu ne te trompes de combat…

— Vous dites ça pour protéger votre ordre !

— Oui, peut-être. Ou alors, c’est toi que j’essaie de protéger. J’ai échoué avec Anakin. Je me suis montré trop laxiste. J’aurais dû réagir dès que j’ai commencé à soupçonner ce qui se passait avec Padmé. J’aurais dû prendre des mesures plus drastiques. Mais, j’ai été négligent…. Et on sait tous ce que ça a donné. Anakin était l’Elu et il a gâché son destin à cause d’elle. 

— Je ne pense pas qu’aimer soit une faiblesse. Ce sont les Jedis et leur doctrine qui en font une d’elle. Ce sont vos dogmes idiots interdisant les émotions ou la passion qui l’ont poussé à se tourner vers le Côté Obscur. 

— En effet…  Ce n’est pas toujours une faiblesse, je te l’accorde. Après tout, sans cela tu ne te tiendrais pas devant moi, dans la Lumière. Le monolithe t’aurait repoussé. Mais, tu dois comprendre une chose avant de poursuivre ta quête. Pour obtenir ce que tu convoites, il va falloir que tu fasses un choix, jeune Ben : Rey ou ton idéal. Tu ne pourras posséder les deux. »

Rey ou ma promesse… Impossible. Sans Rey, je ne pourrais pas terminer ce que Vador a commencé. Et, si je ne tiens pas ma promesse, Rey sera toujours menacée par Sidious.

Obi Wan me regarde avec intensité.

« Le pouvoir que recèle votre Dyade est immense et je comprends que tu sois tenté de l’utiliser pour mettre un terme aux agissements de Palpatine. Mais, il existe d’autres moyens d’atteindre cet objectif. De tous temps, les Jedis sont parvenus à freiner la propagation de l’Obscurité. C’est la raison d’être de notre Ordre. En nous rejoignant, en renonçant à Rey et à ce que tu éprouves pour elle, tu pourras tout autant atteindre le but que tu t’es fixé. Fais le bon choix, l’harmonie, la connaissance et la paix que tu recherches au fond de toi sont à ta portée, il te suffit de renoncer à tes passions physiques pour épouser la spiritualité. Tu en es capable, je le sens. Penses-y, Kylo Ren, puisque c’est ainsi que tu as choisi de te faire appeler. »

Sans plus de sommations, il disparait. Qu’est-ce que c’était ? Une mise à l’épreuve ? Un avertissement ?

 

La Force me pousse en avant et je parviens dans une salle immense, semblable à celle d’un conseil. La lumière y est aveuglante. Je cligne plusieurs fois des yeux et je finis par discerner quelque chose. Une masse sombre et petite… Une odeur de marais me parvient et je fronce le nez.

« Trop instable, tu es. Pourtant, devant moi tu te tiens… »

Yoda… Celui dont la rigidité a hâté le passage du Côté Obscur d’Anakin. Celui qui a enseigné à Luke…

« Un padawan intéressant tu fais.

— Je ne suis pas un de vos padawans ! »

Les mots sont sortis de ma bouche avant que j’aie pris le temps de réfléchir et je m’attends à tout instant à subir un assaut de Force.

« Vraiment ? Te regarder, tu devrais… »

Quoi ? 

Maitre Yoda fait léviter un miroir jusqu’à moi et je me découvre, vêtu de la tenue traditionnelle des Jedis. Non !

« Ce n’est pas moi. J’ai tourné le dos à tout ça il y a longtemps. Comme celui que vous appeliez Anakin Skywalker », ne puis-je m’empêcher d’ajouter.

Il me contemple longuement.

« Fort tu pourrais être, mais faible tu es. Te libérer de tes attachements, tu dois. Sans quoi, à ta perte, ils te conduiront. 

— Vous cherchez vous aussi à me convaincre de ne pas me servir de la puissance de la Dyade. Mais c’est inutile.

— De la souffrance et du malheur elle t’apportera. Trop tard, il n’est pas.

— Pour quoi ? Pour vous rejoindre ? Pour devenir un Jedi ? Même si je le voulais, c’est impossible. Je ne renoncerai jamais à Rey, elle est tout ce qui importe à mes yeux. »

Le visage de Maitre Yoda se fait grave.

« Une terrible erreur, tu commets. Par deux fois déjà, des Jedis ont fauté au nom de leurs sentiments. Les règles, deux d’entre eux ont transgressées. Beaucoup de chaos, leurs écarts provoquent. Gravement, l’harmonie est endommagée.

— Vous avez tort. Il n’y avait rien de mal dans la relation d’Anakin et de Padmé. Si vous l’aviez aidé au lieu de le condamner, les choses seraient bien différentes aujourd’hui !

— Persuadé tu es, je le vois. Beaucoup encore il te reste à apprendre sur la Force. Tout tu méconnais sur l’Equilibre. Trop, tu ignores sur le Côté Obscur, Dark Kylo. »

Mon sabre laser est dans ma main. Je ne veux pas en arriver là mais s’il ne m’en laisse pas le choix, je le combattrais jusqu’à la mort. Yoda insiste :

« Considérer toutes les possibilités, il te faut. Tes émotions oublier pour raisonner. Souviens-toi. Toujours par deux, les Siths vont. Un maitre et son apprenti. Un grand-père et sa petite fille. Ni plus, ni moins. Pour toi, aucune place. »

Je frémis.

« Rey n’est pas un Seigneur Sith. 

— Plus que toi, elle l’est. Corrompu, son cœur devient. Destinée à l’Obscurité elle a toujours été. Tort, Luke a eu de lui faire confiance. »

Je serre les dents. L’obstination de ce débris d’un autre temps commence à sérieusement me taper sur les nerfs.

La bouche de Yoda s’incurve en un sourire.

 

Brusquement, le décor s’efface autour de moi et je me retrouve dans la salle du trône de Sidious. Un vent terrible souffle dans la pièce, porteur de Force mais aussi de malheur. Rey, le sabre laser à la main se tient à quelques mètres de moi et je me vois à ses côtés. Nous le combattons ensemble. Soudain, Rey s’écroule et je me précipite pour lui venir en aide. Je la serre contre mon cœur. Je sens la vie s’échapper de moi mais je ne peux pas la laisser mourir. Je ne peux pas. 

Un hoquet m’échappe. J’assiste à ma propre mort. Lorsque mon corps s’effondre, Rey se tourne vers Sidious. 

« Il est parti… Vous l’avez tué !

— A présent, tu n’as plus que moi, apprentie. »

 

La vision s’arrête là et je me retrouve dans la salle précédente. Me faisant face, Maitre Yoda lève un index sentencieux.

« Un aperçu de l’avenir, tu as eu. »

J’en ai assez de ses aphorismes ! 

« Vraiment ? N’était-ce pas vous qui disiez : Toujours en mouvement est l’avenir ? »

L’expression de Yoda est indéchiffrable. Je force mon avantage.

« La vérité, c’est que vous avez peur de la Dyade et de ce que nous pouvons faire ensemble. Mais, toutes vos pseudos visions prophétiques ne me détourneront pas de Rey, pas plus que de notre but. Nous allons trouver les artéfacts et nous allons les utiliser pour vaincre Sidious. Nous allons mettre un terme à la guerre entre Sith et Jedi. Nous allons rétablir l’harmonie. Il est temps que débute une Nouvelle Ere pour la Force, sans Jedis et sans Siths.

— Trop impulsif, trop ambitieux, ignorant tu es.

— Sans doute. Mais, j’apprends très vite. »

Yoda parait contrarié.

« Insolent… Tout comme Anakin Skywalker. Comprendre, tu ne veux pas. Vous sauver tous les deux, j’essaie. 

— En me conseillant de renoncer à Rey ? Histoire que je devienne un Jedi  obéissant à vos principes ? Un bel avenir de solitude et de tristesse…

— Seul, un Jedi n’est jamais. Toujours avec lui, sont ses frères.

— Oui, j’en ai eu un aperçu. Luke Skywalker m’a montré ce qu’était la fraternité pour les Jedis… j’ironise. Donc, désolé, mais je passe mon tour. Et, histoire d’être compréhensible pour vous : Toujours par deux, la Dyade va. Rey et Kylo. Lumière et Obscurité. Rien de de plus, rien de moins. 

— Te prévenir j’aurais essayé. Je ne peux rien t’apprendre, tu ne prêtes aucune attention. Trop de solitude, de frustration et de colère en toi. Comme ton grand-père, tu n’es pas prêt. Désespérante ta lignée est. Un Jedi doit avoir l’engagement le plus profond et l’esprit sérieux. L’engagement tu as, mais comme les autres, de chemin tu te trompes. Ton esprit trop tourné vers un passé qui n’est pas le tien pour faire attention à l’avenir. Par tes sentiments, déconcentré. Tout, tu risques de perdre à cause de précipitation.  Incomplètes, tes informations sont. Si tu choisis la voie la plus rapide et la plus plaisante, un échec cuisant tu seras. Trop concentré sur la Dyade, pas assez sur l’Equilibre. Aucun succès possible. »

Sur ces mots, Maitre Yoda disparait. 

Jamais je ne me suis senti aussi soulagé. Cependant, je suis surpris, je ne pensais pas le voir abandonner aussi facilement. 

 

Je poursuis ma progression En dépit de la vive luminosité, j’ai l’impression de m’enfoncer de plus en plus dans le sol de Mortis. Tout d’un coup, j’aperçois un Cristal de Force d’une blancheur quasi aveuglante. Son appel bondit vers moi. Je n’ai aucun doute : c’est l’artéfact. Alors que je m’avance vers lui, une silhouette s’interpose entre nous et la lame d’un sabre laser se met à briller.

« Pas encore… »

 


Chapitre 49                                                                                                     Chapitre 51


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