Chapitre 6 : Désillusions


Queen Anne’S Revenge, Cale

 

 

Les narines frémissantes, Blackbeard laissa la fumée souffreteuse envahir ses narines et ferma les yeux pour affronter sans le moindre remords les noirs desseins qui flottaient dans son esprit. A ses côtés, le loa psalmodia dans une langue rauque, venue des âges reculés la formule de protection qui donnerait à son maître les capacités et la force nécessaires pour les mener tous deux à l’accomplissement de leurs projets.

 

Lorsque le loa eut terminé de nouer son sort, Blackbeard ouvrit les yeux.

«  Teague a mobilisé les siens…

- N’est-ce pas ce que tu espérais ?

- Si. Mais il me semble sentir comme une présence. Quelque chose qui était absent depuis des années.

- Il a rappelé son loa. Confirma le sorcier. Ce sont ses charmes que tu ressens. Mais ne t’inquiète pas il est loin de disposer des mêmes ressources que moi. »

Blackbeard ne put retenir un ricanement.

« Teague a toujours été un tendre. Il se refuse à utiliser les âmes. C’est-ce qui le perdra et sa Confrérie avec lui. »

 

Le loa se contenta d’hocher la tête et Blackbeard se tourna vers lui.

« Si tout se passe comme prévu Angelica doit avoir rejoint la bande d’imbéciles que Teague appelle pirates. Assure toi qu’ils ne se doutent de rien. Utilise les âmes pour les attaquer. Eux. La Compagnie. Le Hollandais Volant. Qu’ils soient tous trop occupés à découvrir ma puissance pour se poser des questions. »

 

 

Le Hollandais Volant, Autre monde

 

 

Les poings serrés, Will mit une chaloupe à la mer, ignorant les protestations de Bill.

« Tu ne peux pas faire ça William ! Même pour une heure, tu n’en as pas le droit.

- Le Hollandais Volant doit guider les âmes. Mais rien ne dit que je doive rester sans cesse à bord. Les morts sont nombreux. Ils sont toujours plus nombreux, à chacun de nos passages. Constata tristement Will. Fait les embarquer. Je serais de retour à temps pour les guider jusqu’au repos. »

 

Bill secoua la tête, découragé.

«  Je ne peux pas te laisser faire ça. Si tu ne revenais pas à temps ou bien si tu te retrouverais bloqué dans l’autre monde, rien ne te protégerait de la fureur de Calypso. »

Will abattit son point sur le bastingage et tourna des yeux flamboyants de colère vers son père.

«  Que m’importe Calypso face au fait de savoir qu’Elizabeth est en danger !!! »

Bill soupira lourdement.

«  Je sais William. Tu l’aimes. Mais elle n’est pas seule. Et même si elle ignore l’importance du danger, je ne doute pas que Jack le sache, lui…

- Jack ! Cracha presque Will. Depuis quand peut on lui faire confiance ? Il m’a sauvé la vie c’est vrai. Mais je le connais assez pour savoir que s’il avait à choisir entre Elizabeth et son intérêt il choisirait le second quitte à la mettre en danger. »

 

Bill secoua la tête, non dupe des raisons réelles pour lesquelles Will voulait prendre le risque d’être maudit.

«  Ce qui t’ennuie c’est qu’elle soit avec lui.

- J’ai confiance en Elizabeth ! Répliqua Will avec fougue. Mais pas en Jack. Déclara-t-il d’un ton sombre en enjambant le bastingage.

- Si tu y vas elle croira que c’est en elle que tu n’as pas confiance. Argua Bill, à bout d’idées.

- Je préfère cela à avoir un jour à la prendre à notre bord ou pire, la voir parmi ceux-là… Répondit Will en désignant les âmes damnées avant de descendre vers la chaloupe.

- William !!! »

 

Le jeune capitaine ne se retourna pas et Bill n’eut pas d’autre choix que de le regarder s’éloigner et se rapprocher inexorablement de la frontière qu’il ne devait pas franchir. Le Bottier baissa les yeux, l’angoisse lui serrant le cœur avant de les relever en entendant le cri de colère de Will. Bouche bée, le pirate comprit rapidement qu’à l’inverse des âmes prisonnières qui ne pouvaient venir trouver leur repos, William était lui incapable de passer de l’autre côté.

 

Debout dans sa petite embarcation, Will tenta une nouvelle fois de franchir le passage mais un mur invisible l’en empêcha et le rejeta rudement dans sa chaloupe sous l’œil torve des âmes.

« Je ne comprends pas. » Maugréa le jeune homme.

Alors qu’il se demandait comment une telle chose était possible, les âmes en souffrance commencèrent brusquement à s’agiter. Médusé, Will vit certaines disparaître tandis que les autres se jetaient sur les innocents qui attendaient leur ultime passage.

«  Arrêtez ! Hurla Will en entendant les premiers gémissements de terreur des malheureux que les fantômes pinçaient et torturaient.

- Will !! Revient Will ! » S’écria Bill.

 

Will jeta un regard rempli d’impuissance et hoqueta en voyant l’une des âmes dont il avait la garde se faire déchiqueter par plusieurs de celles que Blackbeard avait en son pouvoir.

«  Les canons !!! Arme les canons ! » Hurla Will à son père qui ramait à présent le plus vite qu’il le pouvait vers le Hollandais Volant.

Bill obtempéra tandis que Will se hissait à bord.

« Les canons …Pointez les sur eux ! » Ordonna Will en priant pour que la menace soit suffisamment précise pour que les âmes cessent leur attaque.

 

Un hoquet de dégoût lui échappa en voyant l’âme d’une femme hurler, tandis que les autres la dévoraient.

« Will ? » Demanda Bill en posant un regard effaré sur les âmes.

Le jeune capitaine ferma rapidement les yeux, cherchant ce qu’il devait faire. Finalement il se résigna alors que de nouveaux cris s’élevaient.

«  Tirez. Ordonna-t-il d’une voix blanche. Je pense que nos canons ne blesseront pas ceux qui sont déjà morts. En revanche ça peut empêcher les autres de les dévorer. Enfin j’espère… »

Bill obéit et les triples canons déchargèrent leurs boulets, désagrégeant les âmes sinistres qui se recomposèrent aussitôt.    

«  Venez ! » Hurla Will à ceux qu’il devait guider.

 

A ses côtés, Bill donna l’ordre de tirer une nouvelle salve, à présent certain que leurs canons ne faisaient de mal à personne, la riposte offrait simplement de précieuses minutes à ceux qui étaient là pour rejoindre le repos.

«  Ça marche… » Sourit-il à Will.

Contrairement à ses attentes, ce dernier ne sourit pas.

«  Oui, mais pour combien de temps ? » Murmura-t-il d’un ton funèbre.

 

 

Queen Anne’s Revenge, Pont

 

 

Philip, assis à même le sol, faisait mine de ranger des cordages tout en suivant avec attention la conversation des deux marins debout non loin de lui. En effet, depuis le baiser qu’il avait échangé avec la jolie Syréna, le jeune missionnaire mettait un point d’honneur à espionner ses compagnons et cherchait à glaner au fil des conversations des indications qui lui permettraient de sauver sa belle quand bien même il devrait pour cela mettre en danger son âme immortelle, sa seule possession en ce bas monde. Cette perspective l’horrifiait indubitablement mais il s’y était toutefois préparé. Après tout que valait son âme au regard de la liberté de sa si merveilleuse chanteuse ?

 

Cependant et malgré tous ses efforts, Philip était bien forcé d’admettre qu’il n’avait pas appris grand-chose. Une conversation dûment espionnée entre Davies et Teach lui avait tout au plus appris que Jack Sparrow et Hector Barbossa étaient des pirates rivaux, raison pour laquelle Blackbeard continuait à mener ses attaques en leur nom, quoique le nombre de celles-ci ait diminué depuis quelques jours, et qu’ils possédaient tous deux une moitié d’une mystérieuse carte que Blackbeard désirait absolument posséder.

 

Lorsqu’il avait eu connaissance de ceci, Philip avait caressé l’idée de proposer ses services au redoutable pirate et de lui ramener la carte en échange de la liberté de Syréna, le métier d’acteur auquel s’était adonné Philip dans une autre vie s’était souvent accompagné d’activités de coupe bourse et autres larcins lorsque le public avait été particulièrement pingre ou peu fourni, ce que Dieu lui pardonnerait sans nul doute au vu de son repentir, mais il n’en avait rien fait. Après tout si les choses avaient été aussi simples, un pirate comme Blackbeard avait certainement ses propres ressources sans avoir besoin de ses services. Et puis le fait qu’il veuille la carte avait peut-être un rapport avec Syréna. Il avait donc jugé plus sûr de faire mine de continuer à tout ignorer.

 

Trop absorbé par ses activités d’espion, Philip ne s’aperçut pas de la présence de Davies, lequel l’observait depuis maintenant de nombreuses minutes. Le front du second se plissa de contrariété et il s’approcha à pas de loup avant de saisir Philip par le col pour le relever sans douceur.

« A quoi tu joues Phil ? Lui demanda-t-il d’une voix inquiétante tandis que le jeune homme protestait.

- A rien Monsieur. Répondit Philip aussi innocemment qu’il pouvait. Je rangeais les cordages. »

Davies soupira.

«  Phil tu as bien fait d’abandonner la comédie. Tu excelles peut être dans les simulacres de duel et autres mais tu n’es pas très bon menteur. Tu écoutais ces hommes. »

Philip chercha une excuse mais l’autre continua.

« Et ce n’est pas la première fois que je constate que tu nous espionnes. Alors dis-moi : qui t’envoie ? La Confrérie ? »

 

Philip secoua la tête en signe d’ignorance sans forcer cette dernière : il n’avait jamais entendu parler d’une quelconque Confrérie hormis celle de la cacasse à cul nu qu’il avait découverte dans un endroit reculé du royaume de France mais il doutait que ce soit de celle-ci dont l’autre parlait.

« Tant mieux… Soupira Davies. Si ça avait été le cas, nous aurions été obligés de te tuer. Le Capitaine aime pas trop les hommes du vieux Teague. »

Là, Philip ne comprit pas. Teach n’aimait pas ses propres hommes ??? Passant sur cette étrangeté, Philip saisit l’occasion pour poser une question.

« Barbossa et Sparrow font partie de cette Confrérie ? »

 

Davies blêmit.

« Où as-tu entendu ces noms ?

- Ce sont ceux que vous donnez pour vôtres durant les abordages. » Souligna Philip.

Davies soupira.

« Oui c’est vrai. Bof après tout, tout le monde le sait, Barbossa et Sparrow sont des Seigneurs de la Confrérie des pirates. Et le Capitaine n’aime pas la Confrérie.

- Pourquoi ?

- Phil, je vais te donner un bon conseil… Arrête de poser des questions dont les réponses ne t’apporteront que des ennuis et qu’il est inutile que tu aies.

- Cela c’est à moi d’en juger. Rétorqua Philip, agacé.

- Phil, le fait que le capitaine trouve pratique de te garder sous la main ne signifie pas que tu es irremplaçable. » Lui asséna Davies.

Philip ne répondit pas, surpris d’apprendre que Blackbeard avait besoin de lui, il hésita quelques secondes à poser de nouvelles questions puis opta pour la sagesse. Il en avait déjà appris plus qu’il ne l’avait espéré.

« Oui M’sieur Davies. Dites quand est-ce que je pourrais voir Syréna ? » Demanda-t-il à la place.

Il n’avait pas vue la jolie chanteuse depuis plusieurs jours, ce qui le mettait au supplice.

 

Davies secoua la tête d’air las.

« Quand le capitaine l’aura décidé. Mais à ta place je ne serais pas aussi pressé de voir cette charogne. Déclara-t-il en s’éloignant.

- Cela aussi c’est à moi d’en décider… » Siffla Philip entre ses dents avant de se remettre au travail.

 

 

Le Black Pearl, cabine du Capitaine

 

 

Elizabeth, à présent vêtue d’une ample chemise blanche et d’un pantalon qui tenait difficilement autour de sa taille releva le nez en voyant entrer Barbossa, suivi de peu par Angelica.

« Vous avez un cap ? Demanda la jeune femme à Barbossa, évitant soigneusement Angelica.

- Oui Miss Blondinette frustrée. » Répondit cette dernière.

Elizabeth serra les dents et fixa la femme.

« Allez nettoyer le pont Angelica. Tout ceci ne vous concerne pas. Et dites à Jack de nous rejoindre.

- Oh, vous voulez faire ça à trois ? Se moqua Angelica. Enfin en même temps vous avez du temps à rattraper on dirait … »

 

Je la hais … Songea Elizabeth en se levant.

«  Le pont Angelica. Maintenant. Ou les fers pour le restant du voyage. A vous de choisir. Déclara-t-elle calmement

- Oh un capitaine né. Se moqua Angelica. C’est dans les salons de votre père que vous avez appris ça ?

- Non c’est à la barre de l’Empress. Rétorqua Elizabeth. Maintenant disparaissez avant que je ne pense plus avant au fait qu’à présent que nous avons un cap pour trouver votre père vous conserver en vie n’est plus nécessaire. »

Angelica se crispa et la fixa.

« Quelle mégère ! Pas étonnant que votre mari préfère ne revenir qu’une fois tous les dix ans. »

 

Elizabeth inspira profondément et se força au calme, elle ne voulait pas donner à l’autre le plaisir de la voir se mettre en colère, ce qu’elle cherchait de toute évidence.

«  Sortez Angelica. » Répéta-t-elle d’une voix dure tandis que, se désintéressant totalement de la conversation, Barbossa croquait dans une des pommes qui traînaient sur la table.

 

Angelica se crispa et obéit, comprenant que malgré tout son mépris l’autre ne plaisantait pas : elle n’hésiterait pas à la tuer ou du moins à essayer de le faire. Elle sortit donc d’un pas rapide et claqua la porte derrière elle.

« Dites à Jack de nous rejoindre ! » Lança Elizabeth dans son dos.

 

Le Black Pearl, Pont

 

 

Angelica traversa le pont d’un pas rapide, marmonnant les paroles de l’autre fille

« Dites à Jack de nous rejoindre. Minauda-t-elle avant de laisser exploser sa colère. Sale petite garce !!

- Oh j’en déduis que tu viens de voir Elizabeth. » Ironisa Jack à ses côtés.

Angelica se retourna vers lui, furieuse.

« Oh toi…

- Allons trésor c’est pas comme ça qu’une femme doit parler à son mari. La reprit Jack d’un ton amusé. Sérieusement Angie, si j’avais su que tu avais pris toute cette histoire au sérieux…

- Quoi ? Ragea la jeune femme. Tu ne l’aurais pas fait ?? »

 

Jack parut réfléchir un instant à la question et sourit.

«  Si. Déclara-t-il. Puisque te faire croire que nous étions mariés était le seul moyen pour que tu daignes me dire où se trouvait ta carte. En revanche si j’avais su à quel point le trésor auquel elle menait était décevant je me serais contenté de la nuit… Souffla Jack. Et pour ça pas besoin d’échange de vœux non ? »

Angelica détourna le visage, dévorée par le besoin de le frapper et se força au calme.

«  Désolée que tu aies trouvé le trésor décevant. Mais aussi décevant qu’il soit c’était le mien !!!

- Pourquoi remuer le passé ? » Lui demanda Jack avec un grand sourire.

 

Angelica ne répondit pas, les souvenirs de sa déconvenue matinale affluèrent à sa mémoire tout comme sa rage en découvrant que Jack s’était moqué d’elle. Pour dire vrai, elle aurait pu lui pardonner le vol mais jamais elle ne lui pardonnerait de s’être moqué d’elle. Cependant, plus que jamais consciente qu’Elizabeth Swann n’hésiterait pas à se débarrasser d’elle si elle en avait l’occasion et l’empêcherait ainsi d’obtenir l’immortalité, elle se tourna vers Jack.

«  Soit Jack après tout c’était il y a longtemps. » Fit elle mine de capituler.

 

Le pirate sourit joyeusement et s’approcha d’elle.

« Beaucoup trop longtemps si tu veux mon avis Angie. Allons, mis à part ce petit, disons, désagrément ça a toujours bien marché entre toi et moi. Souffla-t-il.

- Oh oui … Ironisa Angelica. Pour une nuit !

- Une nuit avec le Capitaine Sparrow en vaut dix autres, que dis-je cent, avec un autre trésor ! » Pavoisa Jack.

 

La pirate retint la brusque nausée qui lui venait et lui offrit un visage charmeur.

« C’est pas faux … Mais il me semblait que tu avais envie de goûter à cette fille. »

Jack sourit.

«  Elizabeth ? Elle est jolie mais sans aucune mesure avec toi trésor. Et puis l’une n’empêche pas l’autre… Tenta Jack.

- Pour moi si. Rétorqua Angelica.

- Tu la détestes hein. » Ne put s’empêcher de relever Jack.

 

Angelica haussa les épaules, inconsciente tout comme Jack de la présence d’Elizabeth derrière eux depuis de nombreuses minutes. La jeune femme avait rapidement perdu patience en ne voyant pas Jack venir et suivait avec une horreur grandissante leur échange. Pris dans leur conversation, aucun des deux n’y pris garde.

« Angie, ce n’est qu’une gamine … Souffla Jack. Capricieuse et totalement inexpérimentée.

- C’est pour ça que tu l’as élue Roi des Pirates ??? Ragea Angelica.

- Oui. Reconnut Jack. Entre autres choses. Et parce qu’elle est facile à manipuler, contrairement à toi ou à moi. » Souffla-t-il à l’oreille d’Angelica.

La jeune femme sourit.

« Elle n’a rien de commun avec nous.

- Non nous nous ressemblons trop toi et moi… Susurra Jack. Moi et toi… Nous deux… »

 

Derrière le couple, Elizabeth retint un hoquet en l’entendant et la jeune femme serra les dents sans s’en rendre compte tandis qu’Angelica répondait.

« Arrête avec ton boniment Jack. Tu dis ça à toutes les filles avec qui tu veux coucher. »

Jack éclata de rire et s’approcha d’elle, séducteur.

« Tu m’as percé à jour … Mais ça ne change rien au fait que j’ai envie de te prendre. Ici, sur le champ, à même le pont de ce navire Angie… »

Angelica s’apprêtait à le remettre vertement en place lorsque, dans son mouvement, elle aperçut Elizabeth, dont le visage semblait tétanisé.

« Quoi que tu aies envie de me faire trésor, il me semble que la Blondinette veut que tu lui fasses en premier. » Se moqua-t-elle.

Jack s’immobilisa.

«  Elizabeth. » Souffla-t-il en se retournant brutalement

 

Elizabeth baissa rapidement les yeux, rageant de sentir le regard ironique d’Angelica sur elle.

« Si vous avez terminé j’aimerais vous voir dans ma cabine, sur le champ moi aussi. » Déclara la jeune femme en tournant les talons.

Elle se sentait prête à exploser et évitait par conséquent de relever les attaques d’Angelica.

« Dommage ... Commenta Angelica en riant tandis que Jack levait les yeux au ciel.

- A vos ordres Votre Altesse… » Soupira-t-il avant de la suivre.

 

Le Black Pearl, Cabine du Capitaine

 

Barbossa qui était occupé à fouiller les maigres affaires d’Elizabeth en son absence ne s’arrêta même pas lorsque la jeune femme franchit le seuil, suivie par un Jack légèrement embarrassé.

« Ne vous fatiguez pas Barbossa. Le cœur de Will n’est pas ici. Lâcha Elizabeth d’un ton hargneux.

- On ne perd rien à essayer. Répondit le pirate. Où est-il ?

- Si vous croyez que je vais vous le dire… Ragea Elizabeth en s’asseyant, encore sous le choc de la conversation qu’elle venait de surprendre et qui lui laissait un mélange de rage et d’amertume au cœur.

- T’as pas vu du rhum ? » Demanda Jack à Barbossa.

 

Elizabeth les observa tous les deux et se força à reprendre d’un ton détaché.

« Pas de rhum jusqu’à nouvel ordre.

- Vous voulez vraiment ma mort ! S’insurgea Jack

- La ferme. Répliqua méchamment Elizabeth. Le rhum vous rend encore plus stupide que vous ne l’êtes déjà alors vous en priver est la meilleure chose que je puisse faire. »

Barbossa ricana et Jack lui lança un regard mauvais.

 

Avant que les deux autres n’en viennent aux mains, Elizabeth prit la parole d’une voix sèche.

« Lequel d’entre vous possède les cartes de Sao Feng ?

- Lui ! » Répondirent au même moment les deux hommes en désignant l’autre.

Elizabeth soupira.

« J’en déduis que vous en avez chacun un morceau. Remettez le moi.

- Quoi ! S’exclama Jack.

- Mais je ne vois pas pourquoi ! » S’insurgea Barbossa.

 

Elizabeth se leva et laissa libre court à sa colère.

« D’une part parce que c’est un ordre et d’autre part parce que je ne veux pas vous voir vous chamailler comme des gamins pour cette foutue carte alors que nous avons un ennemi à affronter !

- Comme vous avec Madame Sparrow ? Susurra Barbossa

- Bien dit l’ami ! S’exclama Jack avant de reculer sous le regard noir de son ancien second. Désolé, l’habitude. Expliqua-t-il.

- Je ne me chamaille pas avec Angelica. Asséna Elizabeth. J’ai juste hâte d’en être débarrassée.

- Pourquoi ne la débarquez-vous pas ? » Suggéra Barbossa sous le regard effaré de Jack.

Elizabeth grinça des dents. Ce n’était pas l’envie qui lui en manquait mais elle avait encore en mémoire le sage avertissement de Teague aussi soupira-t-elle.

« Je préfère la garder. Qui sait, elle fera peut être un bon moyen de pression face à Blackbeard.

- Bien dit ! Approuva à nouveau Jack. Toujours avoir un moyen de pression. »

 

Elizabeth lui lança un regard haineux.

« N’essayez pas de m’amadouer Jack. Je ne suis pas si facile à manipuler que vous semblez le croire. Pour l’instant la carte Messieurs. »

Aucun des deux ne bougea et Elizabeth leva les yeux au ciel.

«  Je ne compte pas me sauver avec !!

-D’accord mais il la donne en premier ! » S’exclama Jack en désignant Barbossa

Ce dernier soupira et les trois pirates se jaugèrent du regard jusqu’à ce que Barbossa finisse par capituler à contre cœur.

 

Lentement, il souleva son chapeau à larges bords et en explora le fond dont il exhuma la carte soigneusement pliée.

« C’est donc pour ça que tu t’entêtes à porter des chapeaux aussi ridicules ! S’exclama Jack. Je me disais aussi. »

Barbossa se retourna vers lui.

«  Je ne sais pas ce qui me retient de te…

- A vous Jack. Le coupa Elizabeth.

- Vous êtes sûre ? Lui demanda le pirate d’un ton joueur.

- Il me semble avoir été claire. Rétorqua Elizabeth d’une voix tranchante. La carte ou les cales.

- Vous êtes dure en affaires trésor. Commenta Jack en se débarrassant de l’un de ses ceinturons.

- Mais qu’est-ce que vous faites ??? » S’étonna Elizabeth.

 

Un regard quasi diabolique lui répondit et Jack laissa retomber sa seconde ceinture sur le sol tandis que ses mains défaisaient rapidement son fut.

« Et bien comme Barbossa j’ai tendance à utiliser les parties les plus imposantes de ma personne pour dissimuler ce qui doit l’être. » Expliqua-t-il en laissant retomber son pantalon à terre.

Barbossa regarda dans la pièce avec agacement tandis qu’Elizabeth rougissait violement et détournait les yeux une seconde plus tard que la décence l’exigeait.

« Rhabillez-vous Jack. » Souffla-t-elle, le rouge aux joues.

 

Jack leur lança un regard étonné avant d’avancer vers le bureau.

« Je ne vois pas ce qui vous gêne. Certes il donne un peu du gîte à tribord mais ça c’est quand les voiles sont hissées haut ce qui n’est pas le cas ici et …

- Pour l’amour du ciel rhabillez-vous Jack ! » Explosa Elizabeth qui lui lança un regard furibond avant le détourner à nouveau, embarrassée.

Un petit soupir déçu échappa à Jack et il déposa la carte sur la table avant de remonter son fut.

« Voilà votre Grâce, ce qui vous cause une telle peur est bien à l’abri. » Commenta Jack.

Elizabeth ramassa les deux parties de la carte d’une main qui tremblait légèrement et lui tendit celle qu’Angelica avait aidé à faire à Barbossa.

« Suivez ce cap. Et sortez. » Ordonna-t-elle.

 

Écœuré par le tour pris par les événements, Barbossa ne se le fit pas dire deux fois et se précipita dehors.

 

Le Black Pearl, Pont

 

Angelica regarda sortir Barbossa, un sourire moqueur aux lèvres.

« Oh Miss Blondinette qui a le cul en feu n’a pas voulu de vous ? » Ironisa-t-elle devant son air furieux.

Barbossa sursauta et s’approcha d’elle.

« Non. Pour votre gouverne sachez que ce qu’elle voulait ce n’était ni plus ni moins que les cartes menant à la Fontaine de Jouvence ! »

A cette mention Angelica blêmit.

« Quoi ??? Mais pourquoi diable les avoir données à cette punaise !!! »

Barbossa ne répondit pas, conscient que l’autre aurait du mal à comprendre pourquoi il préférait les voir entre les mains d’Elizabeth plutôt qu’entre celles de Sparrow. Après tout Elizabeth lui avait déjà offert le Pearl et il ne doutait pas que les cartes suivraient le moment venu. Quitte à faire semblant d’être d’accord pour partager avec elle. En fait, il les aurait données au Diable en personne si cela lui avait donné l’assurance que Jack ne les aurait pas.

 

Le Black Pearl, cabine du Capitaine

 

Elizabeth fixa Jack qui n’avait pas bougé d’un pouce et se contentait de la regarder en souriant.

« Il me semble vous avoir demandé de sortir. Ragea la jeune femme. Seriez-vous devenu brutalement sourd Jack ?

- Pas plus sourd qu’aveugle. Rétorqua Jack en s’approchant d’elle, un sourire sûr de lui aux lèvres. Et j’ai vu la manière dont vous avez regardé ma cachette. Vous aimeriez bien la toucher hein… » Souffla Jack.

Cette fois la jeune femme laissa libre court à la rage qui bouillonnait en elle depuis qu’elle avait surpris la conversation du pirate avec Angelica et leva la main pour le frapper.

 

Une poigne de fer retint sa main et Jack la fixa.

« Ça me désole de vous dire ça mais vous n’êtes pas très douée en préliminaires trésor…

- Et vous pas très original dans vos approches de toute évidence ! » Ragea Elizabeth.

Jack la relâcha avec un sourire satisfait.

«  Nous y voilà… Je me demandais ce que vous aviez entendu au juste … »

Elizabeth rougit, encore plus furieuse de s’être trahie aussi facilement.

« Pour la dernière fois sortez de ma cabine Jack.

- Pourquoi ? Ironisa le pirate. Vous avez peur de succomber et de vous jeter dans mes bras pour que je vous offre ce que vous désirez tellement ? »

 

Elizabeth ouvrit la bouche, soufflée par sa prétention avant de se reprendre.

« La seule chose que je désire Jack à l’exception des bras de mon mari c’est que vous sortiez d’ici !!!

- Vous en êtes certaine ? Murmura Jack. C’est vraiment ce que vous voulez ? Que je sorte ? Ou alors…. » Commença-t-il en s’approchant, leurs lèvres se frôlant

Elizabeth sourit légèrement avant de reculer, un éclat dur dans le regard.

« Désolée Jack mais une fois était plus suffisante… » Ironisa-t-elle.

Jack sourit moqueusement et s’écarta dans un simulacre de révérence.

« Faites-moi donc appeler quand vous aurez changé d’avis trésor … Je vous promets de venir si je ne suis pas trop occupé.

- N’y comptez pas. Rétorqua Elizabeth. Quand à vos occupations c’est le cadet de mes soucis. Retournez donc voir votre femme je suis certaine qu’elle n’attend que ça. Cracha-t-elle

- Tant pis pour vous … » Soupira Jack avec exagération avant de sortir.

 

Une fois seule, Elizabeth se dirigea d’un pas rapide vers la bouteille de rhum qu’elle avait cachée pour les grandes occasions et la déboucha nerveusement

« Maudits pirates… » Ragea-t-elle avant de s’accorder une large rasade.


Chapitre 5                                                                                                         Chapitre 7


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