Chapitre 66 : Kylo Ren


Destroyer Steadfast,

 

 

 

Mon oreille me brule, me dévore. Cet idiot de trooper renégat m’en a arraché la moitié. Je relève mes cheveux pour constater les dégâts et ma rage se réveille à la vue du carnage. J’ai vraiment du prendre sur moi pour ne pas le tuer.

 

Rey pénètre dans ma chambre et se précipite vers moi.

« Tu aurais dû utiliser notre connexion pour me rejoindre, ça aurait été plus discret », je lui jette, passablement agacé par l’état de mon oreille.

Certes, mes cheveux les dissimulent la plupart du temps, mais quand même !

« Je voulais voir comment tu allais et, de toute manière, Pryde est occupé à organiser la surveillance des Résistants, je lui ai promis qu’au moindre soupçon d’évasion je m’occuperais de son cas en personne. »

 

Je sens une pointe de satisfaction en elle à la pensée de la crainte qu’elle inspire à Pryde. Elle se rapproche de plus en plus du Côté Obscur mais lui en faire la remarque maintenant ne serait sans doute pas judicieux. Et puis, je dois admettre qu’il y a quelque chose d’excitant dans le fait de la voir ainsi… Sûre d’elle, pleine de sa puissance. Sans oublier l’uniforme sombre du Dernier Ordre qui lui va comme un gant. Le noir fait ressortir à merveille sa peau blanche et le tissu épouse si parfaitement son corps que j’ai envie de

 

« Tu es conscient que je peux percevoir presque tout ce que tu penses, n’est-ce pas ? »

Oups…

Elle se penche sur mon oreille et serre les mâchoires.

« Il ne t’a pas loupé.

— Ce n’est rien. A part cet incident, je dois admettre que ton plan était brillant. Non seulement plus personne ne doute de ton allégeance au Dernier Ordre mais en plus, j’ose croire que tu as récupéré ton Cristal. »

 

L’air satisfait, elle l’exhume de sa chemise et le fait tourner un instant entre ses doigts. Les surfaces sombres du Cristal semblent avaler la lumière. Un brutal malaise me saisit à sa vue.

« Comment tu as fait ?

— J’ai profité du fait que tout le monde était focalisé sur ton affrontement avec Finn pour m’approcher de Kaydel et le récupérer. »

 

Mon malaise augmente alors qu’elle continue à le faire jouer entre ses doigts, me répondant sans me regarder. Elle est littéralement fascinée.

 

« Kaydel te l’a rendu sans protester ? » je lui demande pour briser le charme.

Elle s’interrompt, songeuse.

« Oui… Je n’en suis pas sûre, mais je crois qu’elle a deviné que tout cela était une mascarade pour me permettre de le récupérer.  

— Elle risque d’en parler aux autres ?

— Je ne pense pas. Elle est intuitive, elle a sûrement compris l’importance de garder le silence. Et puis, de toute façon, ils ne l’écoutent jamais. Même Poe. Je crois qu’ils la prennent pour une idiote.

— Ce n’est pas le souvenir que j’en ai… Au contraire, Kaydel a toujours été remarquablement intelligente, si c’est ce que tes amis pensent d’elle, c’est qu’ils sont encore plus bêtes que je ne le croyais. »

 

Rey me fixe un instant et je la sens brusquement tendue, jalouse. Je lui caresse la joue.

« Et toi, comment tu te sens ? Ça a dû être difficile de supporter leurs regards accusateurs. Je sais à quel point ils te sont chers. »

Elle déglutit et ferme brièvement les yeux.

« J’espère qu’ils comprendront… et qu’ils me pardonneront, s’ils le peuvent. »

Je l’enlace.

« On ne peut rien leur dire… Si Sidious lit en eux…

— Je sais. »

 

Nous nous regardons un long moment puis je brise notre étreinte à regret. 

« Tu as le sabre de Vador ?

— Toujours. »

 

Comme la première fois, nous nous asseyons face à face, le sabre et le Cristal entre nous. Rey s’immerge totalement dans le pouvoir Obscur du Cristal mais pour ma part, j’ai du mal. J’ai l’impression qu’il cherche à me dominer, à s’insinuer en moi. Je me concentre pour le forcer à rejoindre celui du sabre de Vador mais mon malaise ne me lâche pas.

« Il faut que tu l’acceptes, souffle Rey. Cesse de lutter contre lui puis, oblige-le à t’obéir. »

Je me force à m’ouvrir à lui et des images de destruction se matérialisent dans mon esprit. Je vois Rey, triomphante. Je me vois à ses côtés. Nous sommes ensemble, nous sommes heureux.

« Ne le laisse pas te dominer ! » me rappelle Rey.

 

Je me concentre et reprend l’ascendant sur le Cristal. Je sens la puissance que Rey déploie pour le forcer à lui obéir. Des gouttes de sueur coulent le long de mon dos et je dois réellement lutter pour le faire ployer. Lentement, je le sens rejoindre le sabre de Vador. Les deux cristaux se touchent désormais mais le Cristal Obscur cherche à se dérober.

« Oblige-le, maintenant ! » halète Rey.

Le Cristal grogne mais il finit par se fondre dans le sabre. Lorsque j’ouvre les yeux, il me semble que sa lame s’est assombrie.

Rey, essoufflée, me sourit.

« On a réussi… »

 

A présent que le Cristal a épousé celui du sabre de Vador, je me sens soulagé, comme si le poids sombre qui alourdissait l’atmosphère s’était envolé.

« Tu le sentais aussi, n’est-ce pas ? » chuchote Rey.

Je la fixe et je réalise alors l’emprise que le Cristal avait sur elle, comme s’il la poussait vers le Côté Obscur, réveillant ses mauvais penchants, son égoïsme, mais également sa passion.

« Pourquoi tu ne m’en as pas parlé ?

— Je n’étais pas sûre, je ne savais pas si cela venait de lui ou de moi… Même à présent, je ne suis pas certaine qu’il soit seul responsable. Après tout, en acceptant de pénétrer dans le Bastion, je me suis engagée à reconnaitre ma part d’Obscurité. Et le Cristal Lumineux n’a pas semblé te faire beaucoup d’effet alors… »

 

Je réfléchis quelques instants avant de secouer la tête.

« Si, il m’a influencé. Je ne m’en suis pas rendu compte sur le moment, mais, je réussis mieux à maitriser mon impulsivité. J’ai même dû me faire violence pour reprendre mon uniforme de Dark Kylo et, à chaque fois que l’occasion s’est présentée, j’ai privilégié l’utilisation de pouvoirs Lumineux alors que je n’en maitrisai quasiment aucun lorsque j’étais encore un padawan. C’est sans doute aussi pour cela que ton attirance pour le Côté Obscur me terrifiait à ce point. »

 

Rey m’adresse un regard empli de tendresse et je caresse sa joue.

« J’ai confiance en nous, nous allons réussir.

— Oui… mais à quel prix ? Cristal ou pas, je trouve toujours cela injuste, » soupire-t-elle.

Mon cœur se serre et je l’embrasse.

« Peut-être que quelque chose nous échappe encore, ce ne serait pas la première fois. Mais je veux que tu me promettes de ne pas succomber au Côté Obscur. Quoi qu’il arrive, quoiqu’il se passe sur Exegol, tu dois me laisser accomplir mon destin jusqu’au bout et ne pas te tourner vers Sidious. Si tu le faisais, tout ce que nous avons accompli jusqu’à présent ne servirait plus à rien. Jure-le Rey.

— Je te le jure », souffle-t-elle contre mes lèvres.

 

Je sens le gout de ses larmes dans notre baiser et je la serre un peu plus fort contre moi. Ses pensées s’imposent à moi, emplies de tristesse et de peur. Son angoisse de la solitude me brise le cœur. 

« Tu ne seras jamais seule, il y a tes amis.

— Encore faut-il qu’ils survivent assez longtemps pour pouvoir me pardonner, soupire-t-elle.

— Oh ne t’inquiète pas, je suis certain que Finn serait prêt à accepter un peu près n’importe quoi venant de toi, tu n’auras qu’à dire que je suis responsable, que je t’ai forcée… »

 

Rey sursaute, surprise par mon amertume. Je grimace.

« Je ne supporte pas la manière dont il te regarde. Il te convoite ouvertement alors que tu es à moi.

—Et je le serais toujours, souffle Rey. Finn pourrait bien me faire toutes les déclarations du monde, il n’est pas toi. Et, moi, ce n’est que toi que je veux. »

La ferveur qu’elle met dans sa déclaration me touche mais elle m’attriste aussi.

« Si ça tourne mal, je ne veux pas que tu passes ta vie à entretenir mon souvenir. Il faudra que tu passes à autre chose.

— C’est ce que tu comptes faire si je ne survis pas ?

— Non. Cette probabilité n’existe pas, je ne te laisserais pas mourir. C’est hors de question. »

 

Rey baisse les yeux et, une fois de plus, la tension s’installe entre nous.

« Si tu me laisses, tu n’as pas ton mot à dire sur la manière dont je vais mener ma vie.

— Je ne veux pas que tu vives seule, comme un ermite, à la Luke !

— Ca ne risque pas d’arriver, attendu que tu as détruit Ahch-To.

— Oh ça va, il y a plein d’autres planètes dans la Galaxie, je te signale ! Je suis certain que tu en trouveras une à ton gout. »

 

Les yeux de Rey s’emplissent de larmes et je me sens soudain idiot.

« Excuse-moi… Je suis désolé d’avoir détruit Ahch-To, je ne savais pas qu’elle signifiait autant pour toi. En fait si, je le savais, mais je te croyais morte et j’étais énervé.

— Ce n’est pas à cause de cela que je pleure, souffle Rey. C’est parce que j’ai peur de te perdre. Ca me terrifie, Kylo. Je, je ne suis pas sûre d’y arriver sans toi. »

 

Nous y sommes de nouveau. Je serre les dents à la pensée de Luke et de ses mises en garde. 

« Tu y arriveras. Tu es forte. Plus que je ne le suis et que je ne le serais jamais. Tu vivras une longue et belle existence pour nous deux. Et, si la Force est avec moi, elle me laissera te regarder être heureuse.

— Ce que tu dis est odieux ! rage Rey. Même s’il n’avait pas basculé pour devenir Vador, tu penses qu’Anakin aurait pu vivre une belle vie après la mort de Padmé ? Et Leia ? Tu crois qu’elle a vécu une seule seconde de bonheur après la mort de… »

 

Elle s’arrête net, rouge de honte. Mon cœur est plus lourd que jamais.

« Après la mort de Han, je complète calmement. Non, je sais. Il n’y a pas un jour où je n’y pense pas.

— Pardon, je n’ai pas réfléchi, c’est que de t’entendre parler tranquillement de la vie que tu imagines pour moi si… C’est insupportable ! »

J’effleure sa main pour l’apaiser.

« Rey, je ne veux pas qu’on passe le peu de temps qu’il nous reste à nous disputer. Si la Force exige un sacrifice de nous demain ou après-demain, je ne veux pas que cette conversation soit notre dernier souvenir ensemble.

— Moi non plus. »

Une boule remonte dans la gorge de Rey.

« C’est de tout ça que je veux me rappeler… » murmure-t-elle.

 

Elle inonde mon esprit de ses souvenirs, depuis notre premier baiser jusqu’au moment où nous avons fait l’amour pour la première fois, en passant par la façon dont nous nous sommes retrouvés après la tentative de Sidious pour nous séparer. Je m’entends lui dire que je l’aime et elle partage tout ce qu’elle a ressenti avec moi. A mon tour, je lui réponds sans rien dissimuler, mon désespoir quand elle m’a rejeté, mon envie d’elle, l’espoir quand elle est venue me rejoindre sur Mortis. Nous sommes perdus l’un dans l’autre et, pendant un instant, c’est comme si le monde autour de nous avait cessé d’exister.

 

« Un dernier souvenir heureux », murmure-t-elle.

 

Je l’embrasse avec ardeur. A cet instant, je me moque qu’on puisse nous surprendre. Tout ce que je veux c’est être avec elle et, si j’en crois ses pensées, elle souhaite exactement la même chose.

 


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