Chapitre 8 : Le choix d'Elizabeth


Molokai

 

Après sa dispute avec Will, Elizabeth s’enfonça dans les ténèbres. La jeune femme réfléchissait à toute allure. Elle n’en revenait pas que Will lui demande d’abandonner l’Empress. Bien sûr, elle comprenait qu’il veuille passer du temps à terre après s’être cru condamné à naviguer. Mais elle avait espéré que ce ne serait que temporaire, qu’une fois le souvenir du Hollandais Volant envolé, Will et elle, reprendraient la mer à bord de l’Empress.

 

Sauf que Will voulait qu’elle se sépare de son navire.

 

Le cœur d’Elizabeth se serra à cette idée et une fois de plus les paroles de Lee lui revinrent en mémoire. « Jamais tu n’abandonneras cette vie. Tu ferais mieux de laisser ton mari là où il est Elizabeth. Sinon tu finiras par lui briser le cœur. » La jeune femme poussa un gémissement frustré et elle leva les yeux. Devant elle il y avait l’Empress. Ses pas l’avaient menée jusqu’à lui.

 

«  Je ne te comprends pas. » déclara Will dans son dos.

Elizabeth se retourna et croisa le regard rempli de douleur et d’incompréhension de son mari.

«  Je ne te comprends pas non plus, répondit elle.

- Elizabeth. Tout ça, ce n’est pas pour nous…. » Murmura Will en lui désignant la jonque qui se balançait mollement.

Elizabeth fixa l’Empress. Ses voiles rouges étaient gonflées par le vent et sur le pont quelques lumières brillaient, comme si la jonque attendait son capitaine et retenait son élan.

 

«  C’est la jonque de Feng. Murmura Will. Pas la tienne. Il ne te l’a offert que parce qu’il pensait que tu étais une autre.

- Will …

- Elizabeth, je t’aime. Je veux vivre avec toi, vieillir avec toi. Ici, dans cette maison, sur cette île. Tu ne vois pas que c’est notre chance ?

- Je t’aime aussi. Répondit Elizabeth, le cœur lourd.

- Alors sépare-toi de ce bateau… Avec l’argent

- Nous pourrons acheter ta forge, je sais, répondit Elizabeth d’un ton las.

- Notre forge, » corrigea Will.

 

Elizabeth ferma les yeux et Will l’enlaça.

«  Notre rêve… »

Elizabeth se raidit et se tourna vers lui.

«  Et si ? Will, nous n’avons pas besoin de vendre l’Empress pour acheter cette forge, il suffirait, il suffirait d’aborder ce navire dont je t’ai parlé, avec ma part nous pourrions… »

Les bras de Will la désertèrent et elle frissonna.

«  Et conduire d’autres malheureux à la mort ? Est-ce que tu as une idée de ce que les pirates font aux matelots qu’ils attaquent !!

- Je crois avoir mené suffisamment d’abordage pour ça », rétorqua Elizabeth avec vivacité.

Will recula.

«  On dirait que tu as déjà fait ton choix…

- Tout comme toi. » Répliqua la jeune femme.

Le visage triste, Will s’éloigna.

«  Je serais chez nous si tu as encore envie de me rejoindre. »

 

Une fois seule, Elizabeth fondit en larmes. Elle ne comprenait pas ce qui arrivait, elle ne comprenait plus.

 

«  Capitaine ? » lui demanda Jal.

Elizabeth sursauta et sécha ses yeux d’un geste rageur.

«  Pourquoi ne venez-vous pas à bord ? » s’inquiéta l’homme.

Le cœur d’Elizabeth se serra. Elle ne voulait pas perdre Will. Elle ne pouvait pas perdre Will.

«  Dis-moi Jal, as-tu déjà pensé reprendre l’Empress ? » lui demanda t’elle en avançant vers le navire.

 

L’île de la Muerta

 

Tai poussa un glapissement effaré en voyant l’île immergée.

«  Je ne peux pas aller là !! Je ne suis pas comme vous !! » Lança t’il aux squelettes qui l’entouraient.

Lo Chan secoua la tête.

«  On veut juste ton sang. »

 

Tai frémit et les hommes refermèrent leurs os sur son bras. Il était perdu.

 

L’Empress,

 

Un dernier abordage. Un adieu. A la barre de l’Empress, Elizabeth ne cessait de se répéter cette promesse. Un seul abordage qui leur permettrait d’avoir assez d’argent pour acheter la forge de Will. Le souvenir de Lee vit la chatouiller et elle le repoussa.

«  Hissez nos couleurs ! » ordonna-t-elle.

 

Jal lui adressa un signe de tête et le cœur d’Elizabeth se gonfla de fierté en voyant son pavillon claquer sous la brise marine.

«  Armez les canons, préparez les grappins. »

Jal obéit. Leurs yeux se croisèrent et Elizabeth sentit son cœur se serrer. Le second n’avait pas répondu à son offre. Et elle ne le regrettait pas.

 

()()

 

L’abordage fut sanglant. L’arme au poing, Elizabeth déversa sur les marchands toute la colère qu’elle ressentait à l’égard de Will. Une lame frôla sa hanche et lui laissa une profonde entaille puis la jeune femme se tourna vers l’assaillant. Sa lame s’enfonça dans son ventre avec un bruit spongieux et elle sourit. Elle était vivante. Plus vivante que jamais.

 

Molokai,

 

Will avait veillé toute la nuit. A ses côtés, son père soupira. Il ne savait plus quoi dire à son fils. Ne trouvait pas les mots pour lui expliquer…

 

La porte s’ouvrit et Elizabeth entra, le visage blême.

«  Voilà l’argent pour acheter la forge. »

Will se releva à la hâte et l’étreignit.

«  Oh Elizabeth, je te jure jamais tu ne le regretteras, je te le promets. »

Le regard vide, la jeune femme lui sourit.

«  Je suis fatiguée. »

 

Elizabeth se détacha de l’étreinte de Will et elle se dirigea vers la chambre, les joues rouges. Elle avait menti. Ou plutôt, elle avait laissé Will croire à un mensonge. Elle n’avait pas vendu l’Empress. Elle ne pouvait pas.

 

La porte s’ouvrit et elle ferma rapidement les yeux, faisant mine de dormir.

«  Ce n’est pas William. Il est parti acheté sa forge. Il est fou de joie. » lui déclara Bill.

Elizabeth ouvrit les yeux et fit face à son beau-père.

«  Bien….

- L’argent ne provient pas de la vente de votre jonque n’est-ce pas ? »

 

Elizabeth grimaça.

«  Que voulez-vous dire ?

- Que vous êtes blessée au flanc. » Répondit Bill

Elizabeth soupira.

«  Ne lui dites rien. »

Un rire amer échappa à Bill.

«  Il l’apprendra tôt ou tard. Que comptez-vous faire ? Rester ici en prétendant être une autre ? Ça n’a pas marché pour moi.

- J’aime Will, rétorqua Elizabeth avec fougue.

- Vous aimez l’océan plus encore. »

 

Ils se toisèrent puis Elizabeth laissa tomber son masque. Des larmes roulèrent sur ses joues.

«  J’y arriverais. »

Bill lui lança un regard rempli de pitié et lui désigna ce qu’il portait.

«  Je vais soigner votre blessure. »

 

Molokai, deux jours plus tard

 

Will avait commencé à travailler à la forge. Elizabeth, elle, faisait semblant.

«  Bientôt nous fonderons notre famille », sourit Will en lui caressant le ventre.

Le regard d’Elizabeth croisa celui de Bill et le vieux pirate soupira.

 

Un coup retentit à la porte et tout trois sursautèrent.

«  J’y vais », déclara Bill

L’homme disparu et Elizabeth écouta Will lui raconter sa matinée. Le livre de commande ne désemplissait pas, signe d’une richesse future.

«  C’est merveilleux. » répondit mollement Elizabeth.

 

Bill revint dans la pièce.

«  Une erreur.

- Les gens ne sont pas encore habitués à nous, tu devrais rencontrer les autres femmes », déclara tendrement Will.

Le cœur lourd, Elizabeth hocha la tête et Will se leva.

«  Je retourne à la forge, tu viens avec moi papa ?

- Je te rejoins », déclara Bill.

 

Resté seul avec sa belle-fille, Bill sortit un pli de sa poche.

«  Votre second a apporté ceci. »

Elizabeth s’empara de la lettre et le fixa.

«  Vous n’avez rien dit devant Will….

- A quoi bon ? »

Elizabeth resta immobile devant la missive. Elle portait le sceau de la Confrérie.

«  Vous ne l’ouvrez pas ?

- Je ne sais pas Bill » murmura t’elle douloureusement.

 

Le pirate s’approcha d’elle.

«  Je regrette Elizabeth. Pour vous et pour William.

- J’essaie, je vous jure que j’essaie, mais…. » S’interrompit Elizabeth d’une voix enrouée.

Bill sourit tristement et lui caressa la joue.

«  Tôt ou tard elle vous reprendra. Croyez-vous que je n’ai pas essayé ? J’aimais William. J’aimais sa mère. Mais l’océan, la liberté….

- Je ne peux pas l’abandonner.

- C’est ce que je disais aussi. » rétorqua Bill.

 

Elizabeth se mordit les lèvres.

«  Pourtant vous vivez ici. Vous êtes heureux. »

Un nouveau rire amer secoua Bill.

«  Je suis à la fin de ma vie, je ne suis pas capitaine. Je ne suis pas Seigneur. Vous si.

- Je ne peux pas le laisser. »

Bill la fixa et Elizabeth comprit qu’elle venait de mentir. Depuis des semaines qu’elle était à terre, elle s’ennuyait. Elle rêvait de son navire, de l’océan, d’aventures.

«  Si vous en êtes si sûre, pourquoi ne pas ouvrir cette lettre ?

- Pourquoi trahissez-vous votre fils ! Ragea Elizabeth.

- Parce que vous lui briserez le cœur tôt ou tard. Je préfère que cela arrive tant que je suis là pour l’aider. » répondit Bill avec fatalisme.

 

Elizabeth blêmit et se leva.

«  J’en ai assez entendu. »

Bill la toisa.

«  Ne le faites pas souffrir. Plus vous attendrez pire ça sera. Vous pouvez me croire. »

La porte claqua derrière le vieil homme et Elizabeth resta interdite.

 

Elle repoussa la lettre loin d’elle et se força à accomplir les gestes rébarbatifs du quotidien. Finalement, après avoir préparé une énième théière, elle se saisit de la lettre. Juste par curiosité.

 

Le pouvoir de Calypso augmente. La Confrérie a besoin de vous tous.

 

Capitaine Teague.

 

Elizabeth lut et relut les mots tracés à la hâte. Le pouvoir de Calypso. Elle était bien placée pour savoir à quoi il était du.

 

Un coup ébranla sa porte et elle sursauta.

«  Seigneur Swann, déclara Teague en entrant.

- Co…. Comment m’avez trouvée ? Balbutia Elizabeth.

- C’est simple pour qui vous cherche. » Répondit l’homme en s’asseyant.

 

Elizabeth ne bougea pas tandis qu’il promenait son regard sur la pièce.

«  On dit que William Turner ne commande plus le Hollandais.

- On dit vrai. Répondit Elizabeth. William et moi nous vivons ici désormais. »

Les yeux de Teague se plissèrent et il lui renvoya un regard méprisant.

«  Vous voulez dire que vous vous terrez. Vous avez été élue Roi. Et vous allez laisser Calypso user de la Croix contre nous ! »

Elizabeth frémit.

«  La Croix ?

- Oui. Seule la Rose d’Aphrodite pourrait nous permettre de nous sauver mais elle est introuvable !

- Barbossa en a parlé… » Répondit Elizabeth qui s’anima sans s’en rendre compte.

 

Teague cracha sur le sol.

«  Le Seigneur Barbossa n’est plus »

Le cœur d’Elizabeth manqua un battement et une douleur fulgurante la submergea.

«  Il n’est plus qu’une éponge. Il passe son temps à boire à Tortuga.

- Mais il est en vie. » Souffla Elizabeth.

 

Teague lui lança un regard rempli de mépris.

«  Si vous appelez ça vivre oui. J’espérais ne pas voir de mon vivant le déclin de la piraterie mais on dirait que c’est inéluctable.

- Il y a d’autres Seigneurs…

- A quoi bon lorsque celle qui a été élue pour les protéger se terre comme une lâche. » Rétorqua Teague.

Elizabeth frémit.

«  Je ne suis pas lâche !!! Mais Will, il ne veut plus de cette vie alors…. » Commença-t-elle.

Cette fois Teague la regarda avec pitié.

«  J’espère qu’il le vaut Elizabeth. » déclara-t-il avant de sortir.

 

Une fois seule, Elizabeth regarda autour d’elle. Elle haïssait cette maison. Haïssait sa vie. Son cœur cogna dans sa poitrine en songeant au désastre qui attendait la piraterie. C’était elle qui avait offert la Croix à Calypso. Elle ne pouvait pas l’ignorer. « Tu te trouveras de nouvelles excuses. Jamais tu n’arrêteras de pirater tu as la tromperie dans le sang. » Souffla la voix de Lee à son oreille.

 

()()

 

Elizabeth tourna son visage vers Will. Le jeune homme s’approcha d’elle et l’embrassa dans le cou.

«  J’aime te voir cuisiner comme ça, pour nous. Pour notre famille. »

Le cœur lourd, Elizabeth ne répondit pas. Bill lui adressa un regard perçant et soupira.

«  Je vais au village, la veuve Martins m’a invité.

- Tu ne m’en avais pas parlé, s’étonna Will.

- Je ne te dis pas tout, plaisanta Bill. Profite bien de cette soirée William. »

 

Elizabeth déglutit et le regard de Bill se posa brièvement sur le feuillet qu’elle avait laissé sur la table. Le cœur de la jeune femme se serra. Inconscient de ce qui se jouait, Will s’assit.

«  Lord Former m’a passé commande aujourd’hui. »

Elizabeth le servit en silence et se força à lui sourire.

 

Plus tard,

 

Elizabeth se pressa contre le corps de Will.

«  J’ai froid, »murmura t’elle en caressant son sexe.

Will passa un bras autour d’elle.

«  Tu veux que j’aille chercher du bois ? »

Le cœur serré, Elizabeth le retint.

«  Non. Reste avec moi….. »

 

Will sourit et l’embrassa légèrement. Fiévreuse, Elizabeth approfondit le baiser et Will passa sur elle.

«  Je ne veux pas te forcer.

- Tu ne me forces pas. »

Les caresses de Will se firent plus précises, plus tendres, et Elizabeth soupira. Elle avait envie de plus.

«  Je t’aime, murmura Will en s’enfonçant en elle.

- Je t’aime aussi. » Répondit-elle.

 

Will se laissa retomber sur le côté.

«  Tu ne m’as jamais dit comment tu avais convaincu Calypso. »

Elizabeth sourit tristement. La question venait trop tard. Tellement trop tard. Elle savait maintenant que Will ne comprendrait jamais.

«  J’ai fait ce qu’il fallait, répondit elle.

- Tu parles comme un pirate », plaisanta Will.

Elizabeth se força à sourire, les yeux brillants de larmes. Elle ne parlait pas comme un pirate. Elle en était un.

 

Plus tard dans la nuit,

 

Elizabeth alluma une lampe et silence et commença à écrire sa lettre, utilisant le dos de la missive de Teague. Des larmes lui piquaient les yeux.

 

Will,

 

Je sais que tu ne comprendras pas… Mais, je ne peux pas ignorer l’appel de la Confrérie. Des choses graves se sont produites, des choses…

 

La jeune femme barra rageusement les derniers mots et reprit

 

Je n’ai pas le choix…

 

«  Ne lui promettez pas de revenir… » Murmura Bill.

 

Elizabeth sursauta et fixa son beau-père.

«  Vous saviez………

- Je l’ai su dès que j’ai lu la lettre.

- Vous l’avez lue !!

- Pour protéger Will. Elizabeth si vous l’aimez, ne promettez pas de revenir.

- Je reviendrais, je le ferais, » chuchota la jeune femme.

 

Un sourire amer éclaira le visage de Bill.

«  Et pour combien de temps ? Un jour, une semaine, un mois, un an ??? Combien de temps avant de lui briser le cœur à nouveau ? »

Elizabeth s’assombrit.

«  Qui êtes-vous pour me juger ?

- Je ne vous juge pas Elizabeth, répondit doucement Bill. J’essaie juste de vous empêcher de commettre les erreurs que j’ai faites. »

 

Elizabeth se mordit la lèvre les larmes aux yeux.

«  Je l’aime vraiment.

- Je sais.

- Je n’ai jamais voulu ça, je pensais, je croyais…

- Que vous n’auriez pas à faire un choix, répondit Bill d’un ton las. Je l’ai cru moi aussi. Mais l’océan ne rend jamais ses proies. J’ai demandé à la mère de Will de m’attendre. »

Elizabeth frémit et le fixa.

«  Et ?

- Je ne suis jamais revenu.

- Mais ce n’était pas votre faute, c’est Barbossa, il vous a…

- Je ne serais pas revenu Elizabeth. »

 

La jeune femme frémit et posa un regard noyé de larmes sur Bill.

«  Que dois-je faire ?

- Je ne peux pas décider pour vous. »

Elizabeth serra la lettre qu’elle tenait.

«  Je n’y arrive pas… »Murmura-t-elle.

La main de Bill se referma sur la sienne.

«  Vous avez libéré Will du Hollandais Volant, vous avez fait ce qu’il fallait. Que vous choisissiez ou non de rester, laissez-lui sa liberté. »

 

Elizabeth ferma les yeux.

«  Je ne peux pas rester.

- Alors ne lui promettez pas de revenir. Ne le laissez pas vous attendre en vain. »

Elizabeth inspira longuement.

«  Vous lui expliquerez ?

- Je lui dirais. Mais je doute qu’il comprenne. » répondit Bill d’un ton triste.

Elizabeth se leva, le cœur lourd.

«  Si je reste je finirais par le haïr.

- Je sais, » répondit simplement Bill.

 

Elizabeth hésita puis serra le vieil homme dans ses bras. Elle avait fait son choix. Le seul qu’elle pouvait faire.

«  Dites-lui que je suis désolée. » souffla-t-elle.

Bill la serra contre lui et hocha la tête.

«  Saluez ce bon vieux Neptune pour moi Elizabeth. »


Chapitre 7                                                                                                           Epilogue


Écrire commentaire

Commentaires: 2
  • #1

    megan (dimanche, 12 octobre 2014 18:16)

    pauvre will ...

  • #2

    Jess Swann (dimanche, 12 octobre 2014 19:09)

    Lol mais nan il le mérite