Chapitre 31 : La fin de Jones


Cela faisait des jours et des jours qu'ils naviguaient et cherchaient le navire de Jones. Jack, excédé, se tourna vers Will pour lui demander pour la centième fois s'il était bien sûr de son cap ce à quoi Will répondit comme toujours qu'il en était certain.

 

En marge de toute cette agitation, Elizabeth regardait la mer qui s'étendait devant elle. En vérité, elle ne voyait pas vraiment ce qui l'entourait, tant elle était plongée dans ses pensées. Elle se revoyait petite fille tandis que son père lui expliquait quels seraient ses devoirs. A ce souvenir elle sentit les larmes lui monter aux yeux, d'aussi loin qu'elle pouvait se le rappeler son père avait toujours été auprès d'elle. Ayant perdu sa mère très jeune, sans frère ni sœur, son père était toute sa famille tout comme elle était la sienne. Mais à présent, Elizabeth était seule, désespérément seule, et elle réalisait l'étendue du vide que son père laissait dans son cœur. Elle se souvint douloureusement de la dernière conversation qu'elle avait eu avec lui, des mots hâtifs prononcés dans l'urgence de la fuite. Elle revit comme dans un rêve ce moment où son père était venu la sortir de prison pour l'emmener en sécurité. Et elle, sans même le remercier, elle était partie après que son père l'ait suppliée de lui obéir, de ne pas lui faire endurer la vision de sa fille montant à l'échafaud. Et elle, elle était partie comme ça en cachette sans même lui dire au revoir, sans même lui dire à quel point elle l'aimait. Elle était partie sans se retourner, mue par une seule idée, rejoindre Will et Jack. Elle ne s'était pas demandé une seconde ce que son père avait pu penser, ou même ce que son acte avait pu lui couter. A présent qu'il était trop tard, elle regrettait la légèreté dont elle avait preuve et s'en voulait amèrement. A tout cela venaient s'ajouter les propos que Beckett lui avait tenus avant de lui apposer sa marque. Il lui avait dit qu'elle était responsable de la mort de son père et même si Tia et Will l'avait assurée du contraire, une partie d'elle se sentait désespérément coupable. Elle regarda tristement la marque qui ornait son bras et pensa que son père aurait été scandalisé par celle-ci. Sans s'en rendre compte elle murmura pour elle-même.

«  Pardon Père, je ne voulais pas vous décevoir, ni vous blesser. »

 

Jack qui se trouvait non loin d’elle, l’entendit et son visage s'adoucit un bref instant. Il s'approcha d'elle.

«  Je suis sûr qu'il le sait trésor. » Lui dit-il simplement.

Elizabeth sursauta et se tourna vers Jack.

« Comment pouvez-vous dire ça vous ne le connaissiez pas !

- Non mais Will le connaissait et de ce que j'ai pu voir, il aurait donné tout ce qu'il avait pour sa petite fille chérie. » Répondit Jack ironiquement, vexé par la rebuffade.

Elizabeth se détourna et ne se donna pas la peine de répondre pendant que Jack essayait de rattraper sa maladresse.

« Je voulais juste être gentil avec vous c'est tout. Soupira-t-il.

- Qu'est ce qui passe ? Intervint Will, soupçonneux.

- Ne t'inquiète pas Will, je n'ai rien fait de mal à mademoiselle. J'essayais juste de l'aider. S'énerva Jack. Du reste je vous laisse. »

 

Une fois que Jack se fut éloigné, Will se tourna vers Elizabeth et l'interrogea du regard.

« C'est vrai ce qu'il a dit ? Tu as l'air toute bizarre, que se passe-t-il ?

- Je pensais à mon père rien de plus et à notre dernière conversation. Tu te rends compte Will, je n'ai jamais dit à mon père que je l'aimais pas plus que je ne l'ai remercié de tout ce qu'il a toujours fait pour moi. Lui dit-elle d'un ton angoissé.

- Mais Elizabeth, ton père savait tout ça voyons ! Ne laisse pas Beckett t'en faire douter ma chérie. » Souffla Will en lui caressant les cheveux.

Elizabeth le regarda, des larmes brillant encore au coin de ses yeux.

« Tu le penses vraiment Will ? Tu ne dis pas ça pour me rassurer ou me consoler n'est-ce pas ?

- Bien sûr que je le pense Elizabeth, ton père savait que tu l'aimais crois-moi, tout comme il t'aimait et ce quoi qu'il arrive.

- Oh merci Will, si tu savais ce que j'avais besoin d'entendre ça lui. dit Elizabeth en l'enlaçant tendrement.

- Je t’aime, Elizabeth. » Murmura Will avant de l'embrasser.

 

A quelque distance du couple enlacé, Jack Sparrow détourna le regard en les voyant s’étreindre, un étrange pincement au cœur. C'est ce moment précis que choisit Marty du haut du nid de pie pour annoncer qu'un navire était en vue. Comme un seul homme, l'équipage se précipita au bastingage pour identifier le bâtiment en question. En fait de navire c'était plutôt une épave misérablement échouée qui s'offrit à leur vue. Elizabeth poussa un soupir bruyant, ce n'était toujours pas le Hollandais Volant. Jack se tourna cependant vers eux, un sourire épanoui aux lèvres.

«  Bien mes amis, nous n'avons plus qu'à attendre que Jones vienne faire son marché.

- En effet. » Confirma Will qui sourit à l'idée de bientôt serrer son père dans ses bras.

 

L'attente commença alors, Will était fébrile à l'idée de retrouver enfin Bill et de tenir la promesse qu'il lui avait faite lorsqu'il était lui aussi retenu à bord du Hollandais Volant. Elizabeth, comprenant les sentiments qui l'animaient, restait auprès de lui, silencieuse et serrait juste sa main pour lui indiquer qu'elle était là. Jack, à côté de Gibbs, scrutait l'horizon ne sachant s'il était heureux de voir cette aventure bientôt terminée. Bien entendu, le fait d'avoir réglé sa dette à Jones en s'en sortant à si bon compte ne pouvait que le satisfaire mais quelque chose le gênait sans qu'il parvienne à mettre un nom dessus. Gibbs, tout sourire, était tout à la joie de voir une aventure qui avait si mal commencée bientôt se finir aussi bien et pas seulement pour Jack. Pour le jeune William aussi ! Bien sûr ils avaient tous payé un lourd tribut pour en arriver là. En particulier Elizabeth, mais Gibbs était persuadé que Will l'aiderait à surmonter cette épreuve. Et puis il y avait aussi le Commodore, sans le porter dans son cœur, Gibbs ne pouvait se défendre d'admirer l'homme d'honneur qu'il avait été, qu'il était encore, enfin peut être.

 

Soudain, ce qu'ils attendaient tous avec plus ou moins d'anxiété se produisit, le Hollandais Volant surgit de nulle part dans une gerbe d'eau salée. Elizabeth, saisie, ne put s'empêcher de reculer d'un pas tout comme Pintel et Ragetti. Le sourire de Jack s'accentua.

 

()()

 

A bord du Hollandais Volant, Jones reconnut avec surprise le Black Pearl, sans trop oser y croire. Se pouvait-il que Sparrow tienne enfin une de ses promesses ? Délaissant le vaisseau échoué il s'adressa à Jack.

« Sparrow ! J'espère que tu n'es pas ici pour tenter d'obtenir un délai supplémentaire car je te le dis tout de suite c'est hors de question. »

En guise de réponse, Jack secoua le petit sac de tissu qu'il tenait à la main.

« Voyons, je suis venu négocier avec toi les termes du retour de ton cœur…

- Bien que veux-tu ? Soupira Jones sachant bien qu'il devrait en passer par les extravagances de Jack.

- Je veux l'épongement total de ma dette et la promesse que tu laisseras le Pearl naviguer sans l'attaquer. Déclara Jack.

- Accordé. S'empressa d'accepter Jones qui s'attendait à cette requête. Ce sera tout ?

- Jack, mon père. Pressa Will.

- Ah oui et libère le Bottier de sa dette aussi et rend le nous vivant. Ajouta Jack de bonne grâce.

- Bien je suis d'accord, cette fois est ce tout ? » Demanda Jones qui commençait à perdre patience.

 

Avant que Jack ait eu le temps de répondre, Elizabeth prit la parole sur une impulsion.

«  Et le Commodore Norrington, libérez le aussi. » Lança-t-elle ne pouvant se résoudre à laisser James finir ses jours dans le Purgatoire de Jones.

En l'entendant Jones sursauta violemment et se tourna vers elle, un éclair angoissé brilla brièvement dans son regard acier.

« Qu'avez-vous dit ?

- J'ai dit que nous voulions aussi que vous libériez le Commodore Norrington, l'homme qui est actuellement dans votre Purgatoire. » Répéta Elizabeth en détachant chaque mot pendant que Jack plissait les yeux et dévisageait attentivement Jones.

 

Celui-ci se tourna vers lui.

«  C'est une plaisanterie Sparrow n'est-ce pas ?

- Oh pour moi tu sais, ce fichu Norrington peut bien rester où il est …

- Jack ! s'écria Elizabeth scandalisée par son égoïsme.

- … mais Mademoiselle à l'air d'y tenir donc je me vois dans l'obligation de te demander sa libération pour lui faire plaisir. » Termina Jack avec un soupir.

Il eut à peine le temps de terminer sa phrase, Jones se tenait devant lui et le dominait de toute stature. D'un geste brusque, il mit la main sur le cœur que tenait Jack et s'adressa à Elizabeth.

« Parlez-moi de cet homme que savez-vous de lui ?

- Norrington ? Euh, il est anglais comme moi, je crois qu'il vient de Plymouth enfin sa famille, balbutia Elizabeth que la réaction de Jones laissait perplexe

- Sa famille que savez-vous d'elle ? Répondez ! » Ordonna Jones.

 

Elizabeth, médusée par la violence que mettait Jones dans sa demande, fouilla dans sa mémoire à la recherche de ce que Norrington lui avait dit sur sa famille. Après tout ils avaient été fiancés elle devait donc connaître se genre de chose. A ses côtés Will regardait Jack d'un air soupçonneux mais constata rapidement que celui-ci ne paraissait pas en savoir plus que lui sur ce qui se passait.

« Alors ? Demanda Jones qui s'impatientait dangereusement et était à deux doigts de se jeter sur la jeune femme pour la secouer.

- Euh ça vient. Déclara Elizabeth. Je crois que ses parents sont morts tous les deux.

- Quoi d'autre, vous savez bien autre chose sur cet homme, sur ces ancêtres ? La pressa Jones.

- Ses ancêtres ? Je crois qu'il m'a dit un jour qu'il était issu d'une famille de marchands enfin pendant les années 1200 ou 1300. Le fondateur de la lignée s’appelait, oh je suis désolée son nom m'échappe. »

A ces mots Jones, dégaina son arme d'un geste brusque et la posa sur la gorge de Will.

« Faites un effort ou je le tue !

- Geoffrey lança Elizabeth paniquée. Non ce n'était pas ça, c'était George oui c'est cela George Norrington ! »

 

En entendant Elizabeth prononcer le nom qu'il redoutait le plus d’entendre, Jones se sentit envahi par une immense lassitude et pour la première fois depuis qu'il n'avait plus de cœur par de la, oui de la peine. Même si c'était théoriquement impossible, c'était pourtant ce qu'il ressentait. Il relâcha doucement son étreinte autour de Will qui s'éloigna rapidement. Jack jeta des coups d'œil autour de lui et tentait de trouver une solution au cas où les choses tourneraient mal.

« Vous êtes sûre du nom ? Demanda Jones après un temps infiniment long à Elizabeth.

- Oui. Confirma celle-ci. Je vous assure que c'est bien George Norrington, répéta t'elle se demandant quelle importance cela pouvait avoir.

- Ma chair, mon sang… Murmura Jones Et je me suis réjoui de ses cris, de ses souffrances, jour après jour… »

 

A ces mots, tous se tournèrent vers lui sans comprendre, qu’arrivait-il au terrible Davy Jones ?

«  Beh alors face de poulpe, tu te ramollis. Lui lança Jack inquiet par la tournure des événements

- J'aurais du savoir, j'aurais du le deviner quand il a dit qu'il voyait ces choses et qu'il entendait la musique. » Continua Jones pour lui-même.

Soudain saisi par un doute affreux, il se tourna vers Will.

« La sorcière, celle qui était avec vous la dernière fois, est ce qu'elle savait qui était cet homme ?

- Tia ? Oui bien sûr comme nous tous. Déclara Will qui ne voyait pas quelle importance cela pouvait avoir.

- Maudite soit elle ! lança Jones. Tu m'entends Tia ou quel que soit ton nom ! Je te maudis, tu as triché ! Tu m'as piégé et forcer à détruire mon sang ma lignée ! Mais c'est terminé tout cela. S’écria-t-il en s'emparant du cœur que tenait toujours Jack d'un geste brusque avant que celui-ci ait eu le temps de réagir. Tu m'entends Tia ! Je maudis ce navire ! Dit-il en désignant le Hollandais Volant. Je les condamne lui et son équipage à rester au fond de l'océan jusqu'à ce qu'un nouveau capitaine soit à sa tête ! »

 

Avant que personne n'ait pu deviner ce qu'il allait faire, Jones dégaina le couteau qu'il portait toujours et le plongea sans hésiter dans son propre cœur. A cet instant des cris d'effroi retentirent à bord du Hollandais Volant qui commença doucement à s'enfoncer dans l'océan.

 

Will se précipita au bastingage mais ne put qu'assister, impuissant, à l'engloutissement du navire et de son père par les flots. Le corps de Davy Jones retomba mollement sur le pont du Pearl tandis que Will hurlait sa peine.

« Papa non ! » Répétait-il en se laissant tomber à son tour sur le pont du navire en sanglotant

 

Tétanisé, le reste de l'équipage ne savait que faire, Elizabeth s'agenouilla auprès de Will et chercha les mots pour le consoler tandis que Jack lui-même restait muet devant le corps sans vie du poulpe.


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