Chapitre 3 : Désirs


Singapour

 

 

Flanquée de Lee qui la suivait à distance respectable, Elizabeth s'enfonça dans les rues de Singapour. Elle marchait d'un pas vif, mal à l'aise sous les regards concupiscents des hommes et le mépris ouvert de certaines femmes. Elle se consola à la pensée que le déguisement semblait bien fonctionner. Mal à l'aise toutefois à la pensée que sa robe ne dissimulait rien de ses jambes et à peine sa poitrine, Elizabeth se rapprocha du port ainsi qu'ils l'avaient convenu.

 

Elle passa devant un groupe de soldats et son cœur fit une embardée. Et si Lee ne l'avait aidée que pour mieux la piéger ? Et si elle était reconnue ? Elle avait été folle de faire confiance à un homme qu'elle connaissait à peine et qui plus est, se trouvait être le frère de son mutin de second ! Comme pour confirmer ses pires craintes, l'un des hommes se détacha du groupe de soldats et s'approcha d'elle. La main d'Elizabeth chercha instinctivement le stylet qu'elle avait glissé dans les plis de sa robe et elle retint son souffle.

« Tu es nouvelle ici » observa le soldat à la panse rebondie.

Les jambes d'Elizabeth se dérobèrent sous elle et elle le fixa, incapable de répondre. Les souvenirs de son dernier emprisonnement lui revinrent en mémoire et elle chercha du regard une échappatoire. Le soldat sourit.

«  Je vois, tu débutes dans le métier hein ? »

 

Le cœur d'Elizabeth se calma un peu et elle repéra Lee qui, à quelques mètres, lui adressait un sourire encourageant.

«  Oui. » répondit elle.

Le soldat glissa un bras autour de sa taille et lui lança un regard brûlant.

«  Mon service se termine dans une heure... Combien ? »

Prise au dépourvu par la crudité de sa question, Elizabeth cligna des yeux et l'homme en profita pour remonter sa main le long de sa hanche. 

« Toi. » Intervint soudain Lee. 

Pour un peu Elizabeth en aurait pleuré de soulagement. 

 

Le soldat se retourna vers son complice.

« Cette fille est prise, trouve t'en une autre. »

Lee le regarda avec froideur et glissa une pièce dans la main d'Elizabeth.

« Viens. » ordonna t'il.

Elizabeth se détacha de l'étreinte de son "client" et avança vers Lee. 

« J'étais là avant toi. » s'interposa le soldat. 

Lee se contenta de sourire. 

« La fille préfère peut être venir avec moi. J'ai de l'argent et je suis prêt à la prendre tout de suite. » 

Elizabeth déglutit et observa le mouvement du soldat pour prendre son épée. 

«  Ça m'étonnerait. 

- Si ! Cria-t-elle presque. Je, j'ai besoin d'argent. »

Le soldat la regarda avec dépit et la relâcha.

«  Sale putain. »lança-t-il d’un ton méprisant avant de s'éloigner.

 

Les jambes flageolantes, Elizabeth recula pour s'appuyer contre le mur mais Lee la saisit fermement par le bras.

« Pas maintenant. » siffla-t-il en l'entraînant.

Elizabeth grimaça sous l'étau de ses doigts.

« Souris ou l'un de ces braves imbéciles va se dévouer pour te donner un client plus respectable. » ironisa Lee.

Elizabeth lui fit un sourire crispé et il s'empressa de l'entraîner dans une ruelle malodorante. Une fois à l'abri des regards, il la relâcha.

« C'était obligé de serrer si fort ? Grinça-t-elle.

- Oui, » répondit Lee.

Un silence pesant s'installa et Elizabeth soupira.

« J'ai l'impression qu'il s'est passé quelque chose qui m'échappe... »

Lee lui sourit avec froideur et un frisson remonta le long de l'échine d'Elizabeth alors qu'elle remarquait sa ressemblance avec son frère.

« Les soldats ne touchent pas aux putains qui se donnent aux inférieurs que nous sommes. » cracha t'il.

 

Elizabeth baissa les yeux.

« Je vois... je comprends.

- Non tu ne comprends pas. Mais ça n'a aucune importance. Les soldats ne tenteront plus d'acheter tes faveurs maintenant et tu pourras circuler sur le port. Ils t'ont suffisamment remarquée pour te reconnaître la prochaine fois. » gronda Lee.

Elizabeth ne répondit pas et Lee la reprit par le bras.

« Ça suffira pour aujourd'hui. » décida t'il en l'entraînant.

 

Elizabeth se dégagea de son étreinte avec violence et le toisa.

« Je ne suis pas un matelot, ni ta putain. Cesse de me donner des ordres. »

Lee la regarda et serra les poings.

« Idiote.... Tu vas tout faire rater. Ici c'est ainsi que les choses se passent alors joue correctement ton rôle.

- Nous sommes seuls, protesta Elizabeth.

- A Singapour plus qu'ailleurs, les murs ont des oreilles. » Répondit Lee.

Elizabeth déglutit et il referma sa main sur son bras.

«  Nous parlerons de ça plus tard, viens. »

Vaincue la jeune femme se laissa entraîner tout en se promettant de reprendre cette conversation à la première occasion.

 

Cette dernière ne tarda pas à se présenter et à peine eurent ils franchi le seuil du repaire de Feng qu’Elizabeth se détacha de Lee.

«  Je réagirais mieux si je comprenais ton plan. Je ne suis pas un pion que l’on utilise Lee. Pas plus toi que les autres. »

L’asiatique posa un regard vaguement méprisant sur elle.

« Tu ne comprendrais pas. Toi tu as été élevée comme eux. Mais les soldats qui vivent chez nous se croient les rois de Singapour. Nous ne sommes que des indigènes à leurs yeux. Lorsque tu as dit à ce soldat que tu préférais venir avec moi, tu es devenue pire qu’une putain dans son esprit. »

Elizabeth tiqua légèrement. Son premier mouvement fut de défendre ceux qu’elle voyait toujours comme les siens puis des bribes de conversation surprises à Port Royal lui revinrent en mémoire. Elle rougit violemment à ce souvenir. Lee avait raison. Ils se jugeaient tout puissants.

 

«  Je vais te laisser. Je reviendrais demain et nous irons ensemble au port. Tous doivent croire que tu es ma putain personnelle. »

Elizabeth recula comme s’il l’avait giflée et Lee ricana.

«  Allons Elizabeth, tu es bien prête à faire ce sacrifice pour retrouver ton bateau non ?

- Je ne vois pas le rapport avec l’Empress, rétorqua Elizabeth qui commençait à soupçonner l’autre de chercher à l’humilier.

- Tai Huang a toujours voulu ce que je possédais. Comment crois-tu qu’il réagira en apprenant ton existence ? »

 

Un lent sourire se forma sur les lèvres d’Elizabeth et elle hocha la tête.

«  Cette fois je comprends.

- Tu n’es pas très vive pour un pirate » lui lança Lee avant de se détourner.

Cette fois s’en était trop ! Elizabeth saisit son stylet et se jeta sur lui. La lame sous son cou elle murmura.

«  Ne commet pas l’erreur de me sous-estimer Lee. »

L’homme ne bougea pas d’un muscle mais elle sentit son cœur accélérer sous ses doigts. Satisfaite, Elizabeth s’écarta.

«  Je voulais être certaine que les choses étaient claires entre nous.

- Elles le sont. » Répondit Lee avant de s’éloigner.

 

 

Une fois seule, Elizabeth se retourna vers le miroir et s’observa. Elle s’aperçut avec surprise que cette fois elle aimait ce qu’elle voyait. Pour la première fois depuis bien longtemps elle ressemblait à une femme. Pas à la jeune fille qu’elle avait été à Port Royal. Ni à celle que Will avait épousée. Non. Celle du miroir avait le regard dur et décidé. Elle ressemblait à un pirate, exception faite des atours de catin et de la poudre qui lui couvrait le visage. Elizabeth grimaça et se tourna vers le baquet d’eau froide pour se laver le visage.

 

Une fois la dernière trace de poudre enlevée et la robe troquée pour une tenue puis confortable, elle s’observa à nouveau. Ce qu’elle vit lui plut pour de bon. Le fard était parti mais elle ressemblait toujours à une femme.

 

()()

 

Il semblait à Elizabeth que le temps s’étirait au ralenti. Maintenant qu’elle savait que Tai serait bientôt là et qu’en plus d’un plan elle avait un allié, il lui tardait de retrouver l’action.

 

Aussi accueillit-elle avec plaisir l’arrivée de Lee. L’homme lui adressa un regard dépourvu de chaleur et se dirigea vers la malle de robes qu’il avait apportées la veille.

«  Tu aurais dû te préparer au lieu de m’attendre. Met cette robe. » ordonna-t-il en lui lançant une robe vaguement dorée aussi indécente que celle de la veille.

Elizabeth grimaça.

«  Je suppose que le corset est obligatoire. »

 

Lee ne répondit pas et s’assit.

«  Tu penses que tu vas le libérer ? »

Derrière le paravent, Elizabeth passa la tête.

«  L’Empress ?

- Non ton époux… Je pensais que c’était pour lui que tu faisais tout ça. »

Les yeux d’Elizabeth se voilèrent.

«  C’est un peu plus compliqué que cela Lee. »

 

L’homme haussa les épaules et Elizabeth se retourna.

«  Si tu pouvais… »

Les doigts chauds de Lee glissèrent sur sa peau et elle sentit son bas ventre durcir tandis qu’il tirait sur les liens du corset.

«  Tu es tendue. » remarqua-t-il sans émotion.

Elizabeth lui jeta un regard furieux et il tira avec brutalité sur les lacets.

 

Elle hoqueta puis se tourna vers lui.

«  Quel est le plan ?

- Tu es ma putain, rien de changé. »

Elizabeth déglutit et passa maladroitement les manches de son bustier tandis qu’il attendait.

 

()()

 

Leur promenade sur le port se passa comme la veille à quelques différences près. Comme Lee l’avait prédit, aucun soldat anglais ne l’aborda. En revanche, de nombreux chinois approchèrent Lee qui se contenta de leur opposer un visage fermé.

«  Que veulent-ils ? Demanda Elizabeth à voix basse après que le troisième ne soit parti.

- Savoir combien j’accepterais pour te prêter. » répondit froidement Lee.

Elizabeth le regarda avec dégoût et il reprit.

«  Tu es plus belle que je ne le pensais. Tai se précipitera quand il saura. 

- C’est-ce que nous voulons non ?

- Oui. » répondit Lee, le visage fermé.

 

Comme la veille ils rejoignirent ensemble le repaire et Elizabeth le regarda se lever.

« Où habites-tu Lee ?

- Nulle part et partout. Tai a brûlé mon sampan le soir où il a réclamé ma fille. »

 

Elizabeth répondit sans réfléchir.

«  Dans ce cas pourquoi ne restes tu pas ici ?

- Non. » Répondit Lee avec une pointe d’hostilité.

Elizabeth s’agaça.

«  Et pourquoi ? Tu m’as surveillée pendant des jours, tu m’as suivie… Nous avons un accord alors pourquoi ?

- Ça ne te regarde pas. » répondit-il sans la regarder.

 

Cela redoubla la colère d’Elizabeth et elle le prit par le bras.

«  C’est parce que je suis anglaise ? On dirait que mon peuple n’est pas le seul à avoir des préjugés.

- Pourquoi veux-tu que je reste ? » Rétorqua Lee.

Elizabeth ne répondit pas. Qu’aurait-elle pu dire ? Qu’elle se sentait tellement seule qu’elle en perdait le sommeil ? Qu’elle passait des nuits entières à se rappeler les caresses de Barbossa et leurs assouvissements brutaux en dépit de sa honte ?

«  Je ne coucherais pas avec toi. » déclara Lee comme s’il avait deviné le tour qu’étaient en train de prendre ses pensées.

 

Elle rougit et se détourné avec violence.

«  Je suis mariée.

- Et ton mari est au loin pour dix ans. Répondit calmement Lee. Mais je ne coucherais pas avec toi. Pas plus que je resterai ici. »

Elizabeth ouvrit la bouche pour répondre vertement mais il lui coupa la parole.

«  Pas parce que tu ne me plais pas. Ni parce que tu es anglaise.

- Oh et pourquoi dans ce cas ? Ne put s’empêcher d’ironiser Elizabeth

- Parce que tu es un pirate. Les pirates prennent et ne donnent rien hormis ce dont-ils veulent se débarrasser.

- Tu ne sais rien des pirates. Tu ne sais rien de moi.

- J’en sais assez. Tu as cette petite flamme dans les yeux quand tu parles de l’Empress. La même que Ching. Jamais tu n’abandonneras cette vie. Tu ferais mieux de laisser ton mari là où il est Elizabeth. Sinon tu finiras par lui briser le cœur. »

 

Elizabeth ne put se contenir et le gifla à la volée.

« Comment oses-tu ? Tu ne me connais pas Lee Huang. J’aime Will ! Crois-tu que cela m’amuse de devoir écumer les océans au lieu de mener la vie dont nous rêvions ? » Bafouilla-t-elle, au bord des larmes.

Lee ne parut pas s’émouvoir de sa gifle et secoua la tête.

«  Je ne crois rien Elizabeth. Il suffit de te regarder pour le voir. Tu es un pirate. Et j’en ai assez des pirates. Une fois m’a suffi » répondit-il en s’éloignant.

 

Elizabeth s’immobilisa net. Ses mots lui vrillaient le cœur.

 

« Une fois m’a suffi »

 

Jack lui avait dit la même chose.

 

Troublée, elle s’assit. Lee avait tort. Elle n’était pas un pirate. Elle n’était pas comme Ching et les autres… Une fois que Will serait revenu ils s’installeraient quelque part où personne ne les connaissait et vivraient comme ils l’avaient toujours voulu. Comme il se devait.

 

 

Le Black Pearl

 

 

Décider de retrouver Sparrow était une chose. Réussir à le faire en était une autre.

 

Barbossa ruminait ce fait tout en croquant une de ces délicieuses pommes vertes. Ils n’avaient mis que deux jours pour retourner à Tortuga après avoir abandonné Grace sur une île. Pourtant, lorsqu’ils avaient débarqués, cela avait été pour apprendre que Sparrow avait quitté l’île quatre jours plus tôt. Malgré tous les efforts de Barbossa, nul n’avait été capable de le renseigner sur la destination du pirate. Certains prétendaient qu’il était en route pour Port Royal, d’autres évoquaient l’Europe, un autre Singapour….

 

Assis devant la lourde table de bois de sa cabine, Barbossa réfléchissait. Que ferait-il s’il était Sparrow ?

«  Je me mettrais une balle entre les deux yeux. » marmonna-t-il.

Sauf qu’il y avait peu de chances pour que Jack fasse une chose pareille.

 

Barbossa se laissa aller en arrière. Il y avait bien la proposition de Calypso. Trouver la Croix de Ponce Pilate. Devenir immortel. Et se venger d’Elizabeth Turner. Un sourire amusé se forma sur ses lèvres au souvenir de leurs étreintes. Turner n’avait rien appris à la jeune femme. Lui en revanche… Un bon pirate cette Elizabeth, dommage qu’elle soit si obsédée par ce qu’elle prenait pour de l’amour. Barbossa ricana. Les sentiments, l’amour… Tout ce qui empêchait un homme ou une femme d’être un vrai pirate. Pour sa part, il y avait renoncé depuis longtemps. Le sexe apportait assez de jouissance sans qu’il soit nécessaire de le coupler avec des sentiments absurdes. Il suffisait d’ailleurs de voir l’expression que Jack avait eue lorsqu’il lui avait raconté son aventure avec la même Elizabeth pour en être convaincu.

 

Un sourire éclaira le visage de Barbossa à cette pensée. Trouver Elizabeth le mènerait à coup sûr à retrouver Sparrow et sa carte. Certes, il ignorait tout autant où était Elizabeth. Mais il la connaissait assez pour savoir qu’elle chercherait par tous les moyens possibles à reprendre l’Empress. Son sourire s’élargit encore à cette idée. Elle n’en avait pas conscience mais elle était aussi obsédée par le navire que par son mari si ce n’était plus. Il devait trouver l’Empress et s’en emparer. Ensuite il ne lui resterait qu’à attendre Elizabeth. Il en profiterait pour lui faire payer son vol et récupérer le compas. Sparrow ne tarderait pas ou il le trouverait avec le compas. Il récupérerait ainsi la carte et n’aurait pas à s’exposer à la Muerta pour obtenir l’immortalité. Pour le reste, qu’Elizabeth réussisse ou non dans sa quête lui importait peu.

 

Fort de ce nouveau plan qui lui semblait parfait, Barbossa se leva énergiquement.

«  Tous à terre. Interrogez tous les hommes jusqu’à ce qu’ils vous disent où est l’Empress.

- L’Empress ? S’étonna Marty.

- Es-tu sourd en plus d’être nain ? »

Marty le regarda avec acrimonie mais Barbossa se détourna.

«  Trouvez sa destination ou ne revenez pas…. »

 

Singapour

 

«  Il sera là dans deux jours si le vent se maintient, moins s’il augmente et si nous avons de la chance. » Annonça Lee en déposant ses provisions sur le sol.

Une lueur de plaisir mauvais s’alluma dans les yeux d’Elizabeth.

«  Il était temps. »

Lee lui répondit par un sourire et Elizabeth s’installa à ses côtés.

«  Pourquoi Tai désire-t-il ce que tu possèdes ?

- Parce qu’il est ainsi. C’est un pirate » répondit Lee sans réfléchir.

 

Elizabeth tiqua.

«  Tous les pirates ne sont pas comme lui et comme Ching tu sais.

- Bien sûr des tas de gens bien se font pirates.

- Quelquefois, on a pas le choix… » Murmura doucement Elizabeth.

Lee secoua la tête.

«  On a toujours le choix Elizabeth.

- Crois-tu que j’ai choisi de devenir capitaine de l’Empress ? C’est Sao Feng qui en a décidé ainsi.

- Peut-être parce que tu voyageais avec une bande de pirates !

- Beckett voulait nous pendre, Will et moi. Et puis je devais sauver Jack… »

 

Lee ricana et Elizabeth lui lança un coup d’œil furieux.

«  Pas pour ce que tu crois, mais parce que, à cause de moi il s’est retrouvé au Purgatoire.

- Vraiment ? Qu’est-ce que tu lui as fait ?

- Je l’ai attaché au mat de son navire puis je l’ai laissé se faire dévorer par le Kraken. » Répondit Elizabeth avec froideur.

Lee sourit avec amertume.

«  Je vois que tu connais la cruauté…

- C’était lui ou nous tous. Je ne le regrette pas. »

 

Un silence suivit ses paroles puis Lee demanda.

«  Comment as-tu réussi à l’attacher ? »

Le rouge aux joues, Elizabeth le fixa.

«  Je l’ai embrassé. Ça a détourné son attention.

- Des méthodes de pirate mais je suppose que ça non plus tu ne l’as pas choisi.

- Je n’avais vraiment pas le choix !! Quant aux méthodes et bien, du moment que ça fonctionne. » Se justifia platement Elizabeth.

 

Lee secoua la tête.

«  Tu ne devrais pas aller chercher ton mari.

- Je ne peux pas le laisser. C’est pour ça que j’ai besoin de l’Empress.

- Comme tu ne pouvais pas laisser Jack ? »

Elizabeth serra les dents.

«  Tu ne me connais pas Lee.

- Tu ne m’as pas répondu.

- Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait pour être avec Will. Pour le retrouver. Je n’attendrais pas les bras croisés pendant dix ans si j’ai une chance de le ramener. Une fois que j’aurais trouvé la Croix de Ponce Pilate, je demanderais à Calypso son prix pour le libérer. »

 

Lee éclata de rire et Elizabeth le regarda, furieuse de voir ses sentiments bafoués.

« Pourquoi ris-tu !!!!

- Parce que tu te cherches des excuses pour partir à l’aventure et courir les mers. Une fois que tu auras libéré ton mari tu te chercheras une autre cause.

- Et toi ?

- Moi ?

- Oui, toi ! Tu n’as pas besoin de navire pour retrouver ta fille. Pourtant tu exiges d’être capitaine. Peut-être est-ce toi qui rêve d’être pirate sans avoir le courage de le devenir réellement. »

 

Le visage de Lee se crispa et pendant une fraction de seconde, Elizabeth crut qu’il allait la frapper. Puis ses traits se détendirent.

«  J’aurais besoin d’un navire pour sauver ma fille. Et je pense que Ching devrait au moins une fois participer à la vie de son enfant. Une fois que j’aurais accompli mon devoir je brûlerais cette maudite jonque.

- Non ! » S’exclama Elizabeth, horrifiée.

Lee secoua la tête avec compassion et elle détourna les yeux.

 

«  Je suis l’aîné. A sa mort, notre père m’a transmis tout le peu qu’il possédait. Tai ne m’a jamais pardonné pour ça, déclara Lee au bout d’un moment.

- Quoi ?

- Tu voulais savoir pourquoi Tai m’en voulait non ? »

Elizabeth hocha la tête et Lee lui désigna la nourriture.

«  Mange. Tu auras besoin de toutes tes forces demain. »

Elizabeth obéit sans répondre et Lee la fixa tandis qu’elle dévorait son repas.

«  Pourquoi tu me regardes ainsi ? » demanda Elizabeth.

 

Lee resta silencieux de longues minutes puis,

«  Je me disais juste que si j’avais accepté l’offre d’un seul homme pour toi, j’aurais eu de quoi acheter dix repas comme celui-ci. Si je les avais toutes acceptées, j’aurais eu de quoi construire une jonque. »

Elizabeth s’arrêta brusquement de manger et le fixa, aux aguets.

«  La nourriture est droguée ?

- Non rassures toi, la carte que tu dois me procurer vaut plus que tout ce qu’on peut acheter. »

 

Elizabeth ne répondit pas et Lee se leva.

«  Tâche de dormir cette nuit. Demain Tai sera peut-être déjà là »

Elizabeth le regarda s’éloigner et soupira. Dormir était une bonne idée mais plus le temps passait plus elle avait du mal à trouver le sommeil.

 

Quelques heures plus tard…

 

Allongée dans les ténèbres, Elizabeth soupira lourdement. Sa prédiction se confirmait. Elle ne parvenait pas à trouver le sommeil, pire des images d’une suave obscénité ne cessaient de la tarauder. Toutes avec Lee…

 

A bout de nerfs, Elizabeth se redressa. Mais qu’est-ce qui clochait donc avec elle pour qu’elle imagine de telles choses avec ce type ? Sans compter que si Lee était l’aîné de Tai, il était plus vieux que ce qu’elle pensait. En vérité il approchait plus de Barbossa en âge que d’elle-même. Barbossa.. Elle réprima un gémissement frustré à cette pensée.

 

«  Je dois penser à Will. » s’ordonna-t-elle à voix haute.

Le croire était une chose. Le faire en était une autre. Les sens en éveil, Elizabeth songea malgré elle à Barbossa. Ses caresses étaient inexistantes. Leurs unions brutales. Elle pensa à Lee et un frisson lui remonta le long de l’échine. Lui aussi possédait la même violence rentrée que Barbossa. Lee était le genre d’homme qui ne perdait pas de temps en serments d’amour et en vaines caresses. Pas comme Will.

 

«  Arrête ça tout de suite Elizabeth. s’ordonna-t-elle en faisant les cent pas

- A qui parles-tu ? » Demanda Lee.

La jeune femme s’empara de son sabre et se jeta sur lui avant de baisser son arme.

«  Qu’est-ce que tu fais là ? J’aurais pu te tuer !! » Ragea-t-elle.

 

Un regard calme lui répondit.

«  Je suis venu te chercher. L’Empress a jeté l’ancre dans la baie il y a une heure. »


Chapitre 2                                                                                                       Chapitre 4


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