Chapitre 68 : Anakin


Dans le corps de Ben,

 

 

Je prends une profonde bouffée d’air alors que mon esprit fusionne avec celui de Ben. La sensation de posséder de nouveau un corps est étrange, presque dérangeante. Le pouvoir de Rey m’emplit au même titre que Ben et j’utilise l’énergie de la Dyade pour me maintenir en lui. Mon petit-fils, mon sang. Toute sa vie il a cherché à me parler, toute sa vie il a appelé ma présence. Juste pour ce moment.

 

« Rey, non, Rey ! »

 

Son désespoir se répercute en moi, me brouille l’esprit et j’utilise un peu de ma nouvelle force pour l’obliger au calme.

« Je suis désolé, Ben. Mais la Dyade n’existe que pour servir l’Elu. Heureusement, Rey l’a compris avant qu’il ne soit trop tard. »

 

Je ressens de plein fouet sa déception et son amertume mais je ne m’en soucie pas. J’ai un compte à régler. Cela fait trop longtemps que j’attends cet instant.

 

Je ramasse le sabre laser que Rey a laissé échapper lorsqu’elle a rendu son dernier souffle et je le serre dans ma main libre. De l’autre main, je tiens celui que j’ai forgé lorsque j’étais encore un padawan. Deux sabres lasers, un bleu et un rouge. Anakin Skywalker et  Dark Vador. Deux entités qui se répondent.  C’est ce que je suis.

 

Il est là. Devant moi, à ma merci. Le moment d’en finir est enfin arrivé.

 

Sidious a un mouvement de recul et je souris. 

 

Il a compris.

 

« Toi ? Impossible… Tu es mort !

— Tout comme vous si je me rappelle bien, pourtant, nous revoilà… L’un face à l’autre. Sauf que cette fois, je ne vous laisserais aucune possibilité de vous en tirer. »

 

Je tourne autour de lui, j’ai toujours apprécié de prendre mon temps, histoire de faire monter la pression.

« Tu as réussi, siffle Sidious. Alors que cette petite garce m’a repoussé tu as réussi à t’incarner en…ça.

— En Ben. Mon petit-fils. Mais, contrairement à vous, je ne compte pas utiliser son corps comme vaisseau permanent. Je ne suis ici que dans le but de vous tuer. Je crois que Maitre Yoda appellerait ça : accomplir mon destin, » je plaisante.

Mon ancien Maitre ricane et l’air commence à crépiter autour de nous. Je hausse le sourcil, moqueur :

« Une Tempête de Force ? Depuis le temps que vous survivez dans des corps clonés vous n’avez pas trouvé mieux ? »

 

Palpatine déchaine ses pouvoirs sur moi mais je lève mes deux sabres lasers. Leurs lames entrecroisées génèrent une Décharge de Force que je m’empresse de lui envoyer. 

 

In extrémis, ma Némésis les dévie et j’entends le cri des Résistants. Je frémis à la pensée qu’il ait pu la toucher mais me reprend. Cette fois, rien ne viendra me distraire de ma mission.

« Dark Vador… Tu as toujours été mon apprenti préféré, susurre Sidious. Un tel pouvoir, une telle impulsivité… »

Mon sabre vert tranche l’air autour de lui mais il m’échappe.

« Tu as réussi au-delà de mes espérances… Tu as dompté ta propre mort », poursuit-t-il.

 

Une vague de fierté se réveille en moi mais je la fais taire. Cet Anakin là est parti lorsque Sidious a exigé de moi la tête de mon fils. Un Eclair de Force me touche de plein fouet et je sens la douleur de Ben. Non. Je ne le laisserais plus faire de mal à ma famille. A mon tour, je déchaine une Tempête de Force et je la projette contre Palpatine.

 

Il la dévie également, un rire moqueur aux lèvres. 

« Tu n’es pas assez puissant, pas assez fort, pour me vaincre… Pourquoi ne pas renoncer ? Pourquoi ne pas garder ce corps et t’allier de nouveau à moi ? Avec tes nouvelles connaissances et le pouvoir de la Dyade nous dominerions la Galaxie. Qui sait, peut-être même pourrions-nous ramener Padmé ? »

 

Je serre les poings, fou de rage. Comment ose-t-il parler d’elle ? La voix de Ben résonne brusquement dans mon esprit.

 

« Ne l’écoutez pas, il cherche à vous déconcentrer. Ne le laissez pas vous toucher, vous valez mieux que ça. »

 

Il a raison, je reprends mon calme et je fais tourner mes sabres dans mes mains. Quel bonheur de pouvoir me mouvoir ainsi, de retrouver cette sensation de puissance.

« J’avais pris la précaution de prélever un peu de son ADN, au cas où… continue Sidious. Allie-toi à moi et je te l’offrirais… Il reste encore une descendance de son sang que nous pourrions utiliser pour la faire revenir à l’aide de la Force. Ta femme est encore là, elle t’attend. Je sais que tu la sens, Anakin. Le vaisseau est ici, à portée de main, il te suffit de t’en emparer. Fais-le et Padmé sera à toi pour toujours, » susurre-t-il en me désignant la fille de Luke, qui statufiée, nous observe d’un air troublé.

 

Elle lui ressemble un peu. 

 

« Avec mon aide, tu retrouveras ta femme, Anakin. Tu ne seras plus jamais obligé de renoncer à elle. Une fois le transfert fait, elle sera de nouveau à toi, son âme inchangée, et aussi amoureuse que lorsque vous vous êtes quittés. »

 

Oh… revoir Padmé. La serrer dans mes bras rien qu’une seconde… Avoir enfin l’occasion de lui demander pardon après toutes ces années.

 

« Oui… Je sais que c’est ce que tu désires le plus, même après tout ce temps, même au-delà de ta mort. Allie-toi à moi et je te l’offre, » susurra mon ancien Maitre.

 

Padmé… J’ai l’impression de sentir encore son parfum dans l’air, d’entendre sa voix me suppliant de rester auprès d’elle... Et maintenant, j’ai une chance de le faire, de la ramener.

 

Mon enveloppe charnelle sursaute et je comprends que Ben cherche à lutter contre moi. Il est bouleversé et se sert de toute la puissance dont il est capable pour me repousser hors de son corps.

 

« Je ne me suis pas battu pour ça ! Je n’ai pas perdu Rey pour ça ! Vous n’êtes pas l’homme que je croyais, vous n’êtes pas digne d’être l’Elu. Pas digne de Padmé. Jamais elle n’accepterait cela ! » 

 

Sa charge m’arrache à la séduction exercée par Sidious. Il a raison. Même si je rêve de serrer de nouveau Padmé dans mes bras, elle me haïrait en apprenant le moyen que j’ai utilisé.

 

Sidious me tend la main.

« Viens, Anakin. Rejoins-moi, rejoins les Siths, nous seuls avons toujours été là pour toi. Les autres ne t’ont jamais rien apporté que de la déception. Luke a causé ta chute avant de te tourner le dos, quant à ta fille, elle n’a jamais eu la moindre compassion pour le sort qui fut le tien. Oublie-les. Une fois que tu auras retrouvé Padmé, tu pourras construire une nouvelle lignée, avoir l’existence dont tu rêvais. Ce sera ta seconde chance, ta vraie famille. »

 

La tristesse de Ben se répand en moi et il se concentre sur Luke et Leia. Je sens l’effort qu’il fait sur lui-même pour entourer d’amour la pensée de Luke. Mais, il se ment, il me ment. Sidious a raison, je lui ai tourné le dos pour sauver Luke et je n’y ai rien gagné. Mais, cette fois, tout serait différent. Padmé et moi nous pourrions tout recommencer.

 

« Vous êtes l’Elu !  hurle Ben en moi avec désespoir. J’ai tout sacrifié pour vous ressembler, pour poursuivre votre œuvre, vous étiez mon modèle, mon idéal. Je croyais en vous. »

 

La main tendue de Sidious est à quelques pas de moi. Dans mes mains, les sabres crépitent. La Force m’appelle, la tentation me submerge. Je regarde brièvement la fille de Luke, Kaydel. Ses grands yeux me fixent et des larmes roulent sur ses joues. Elle a peur pour moi, non pour Ben. Son visage a la même expression que celle de Padmé lorsque je lui ai tourné le dos sur Mustafar. Un mélange de tristesse et d’incompréhension. En la regardant, je réalise que la proposition de Palpatine n’est qu’une chimère de plus. Je n’ai pas besoin de l’aide de Sidious, je n’en ai jamais eu besoin. Padmé vit déjà en Kaydel, comme elle vivait en Leia et en Luke. Comme elle est en Ben. Ce sont eux ma vraie famille.

 

Le sourire de l’Empereur s’efface lorsqu’il comprend qu’il a échoué. Alors, la Force destructrice se déchaine. Je plie le genou, utilisant mes sabres pour avancer vers lui. J’ai besoin de la Dyade, j’ai besoin de son pouvoir… 

 

Ben !

 

Une hésitation, puis je le sens me rejoindre, m’épauler. Il se vide de son énergie pour m’aider mais je l’arrête. Je n’ai pas besoin qu’il meure pour vaincre Sidious. 

 

Je ferme les yeux. Pendant un instant, j’ai l’impression d’entendre la voix de Rey. 

 

Destruction de Force, me souffle-t-elle.

 

Je frémis. Comment a-t-elle réussi à la maitriser ? Je me concentre sur le pouvoir qu’elle a offert à Ben, sur les connaissances qu’elle a partagées avec lui et je la trouve. Le corps de Ben a du mal à résister aux assauts de Palpatine mais plus pour longtemps. Je puise en moi aussi profondément que je le peux et en Ben autant que je l’ose. Je déverse nos haines, nos douleurs, nos frustrations, mais aussi nos sentiments dans la Force et je projette toute ma volonté sur Sidious. Un éclair l’illumine et je perçois sa terreur et son incompréhension lorsqu’il est privé de ses pouvoirs.

 

A présent, il n’est qu’un vieillard rabougri et il recule devant moi.

« Non, Anakin, mon garçon, tu es comme un fils pour moi, tu le sais… »

 

Le sabre de Vador sépare son torse de ses jambes, celui d’Anakin lui ôte ses membres. Je m’approche de lui et j’enfonce mes deux lasers dans son cœur pourri. 

 

La Force vacille, frémit et je tombe à genoux sous l’intensité de son bouleversement. Je sens le corps de Ben se refuser à moi et je me retrouve debout devant lui. 

 

Je suis vivant… Je suis revenu.

 

Ben halète, épuisé.

« Vous vous êtes servi de nous ! » me lance-t-il avant de courir vers Rey.

Je le regarde la serrer contre lui. Sa main tremblante dégage les cheveux de son front et des larmes s’écoulent librement de ses yeux. Il sanglote et berce le corps déjà froid de Rey contre le sien.

« Non, non, reviens, reviens. Je ne peux pas, je n’y arriverais pas sans toi », balbutie-t-il tout en posant sa main sur son cœur. 

 

Il est épuisé mais malgré tout, il cherche à utiliser la Force pour la guérir.

« Ce devait être moi, sanglote-t-il. Pas toi, jamais toi. Je t’aime trop pour te perdre. »

 

Ses mots m’arrachent le cœur. Je ressens la puissance dévastatrice de son chagrin. Je la reconnais. C’est ce que j’ai éprouvé quand Sidious m’a annoncé que ma femme était morte et que j’ai perdu l’espoir.

 

Non ! Je ne peux pas accepter ça. Je ne peux pas laisser l’histoire de Padmé, mon histoire se reproduire.

 

Je les rejoins et j’arrache le corps de Rey aux bras de Ben. Je ferme les yeux et je pose la main sur le cœur de Rey, remplaçant celle de mon petit-fils. Il n’est pas trop tard. Son esprit n’est pas encore parti, elle n’a pas rejoint entièrement la Force. Je prends une inspiration. Il me reste encore de la Force, il m’en reste juste assez pour la ramener à Ben.

« Qu’est-ce que vous faites…souffle Ben.

— Ce qui est juste. »

 

Je sens la Force s’écouler de moi, j’y mets tout ce que Rey a offert à Ben et que j’ai détourné à mon profit. Je sens mon esprit s’effacer pour de bon et rejoindre le vide mais ça ne m’arrête pas.

 

« Père ! »

 

Leia se tient devant moi. Des larmes s’écoulent de ses yeux et mon cœur se serre à la pensée que pour la première et dernière fois, ma fille m’accepte enfin. Elle m’a pardonné finalement.

 

Ben me regarde, perdu, tandis que Leia pleure. 

 

Je sais que le néant m’attend. Je ne pourrais pas faire subsister mon esprit dans la Force et sauver Rey. Je n’ai plus assez de pouvoir pour ça. Ce sera l’un ou l’autre. Mon regard se pose sur la fille de Luke. La dernière chose que j’ai en commun avec Palpatine. Notre petite fille. En la regardant, je sais que j’ai fait le bon choix. Je me tourne une dernière fois vers Ben, il ne me reste plus beaucoup de temps.

« Tu as réussi, mon garçon. Je suis si fier de toi. Grâce à toi, j’ai accompli mon destin et racheté un peu de mes erreurs passées. Ta foi en moi ne mérite pas d’être récompensée par la perte de celle que tu aimes. C’est à moi d’assumer la prophétie de L’Elu. Jusqu’au bout. »

 

Je sens la dernière parcelle de pouvoir qui m’anime rejoindre le corps de Rey et mon esprit se dissout dans la Force. 

 

J’espère que Padmé m’attend quelque part dans le néant et qu’elle est enfin fière de moi.

 


Chapitre 67                                                                                                    Chapitre 69


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